Fiscalité des travailleurs frontaliers belges

Tout n’est pas résolu, mais on y voit un peu plus clair

panneau_luxembourgVous n’êtes pas sans savoir que de nombreux travailleurs frontaliers belges ont eu la mauvaise surprise de recevoir dernièrement des courriers de l’administration fiscale belge leur demandant de justifier leur présence physique, sur le sol grand-ducal, pour l’exécution de leur contrat de travail.

Les deux ministres des finances de la Belgique et du Luxembourg ont signé un accord le 16 mars dernier et le SPF Finance vient de publier cet accord et ses modalités d’application.

Voici un aperçu de ses conséquences:

Règle de tolérance de 24 jours

Contrairement aux années antérieures, où chaque jour travaillé hors du sol luxembourgeois devait être imposé par le fisc belge, l’accord conclu entre la Belgique et le Luxembourg prévoit qu’à partir de l’année d’imposition 2015, une tolérance de 24 jours sera prise en considération. Cela entraine donc que chaque frontalier devant effectué des missions hors du Luxembourg, continuera à payer l’entièreté de ses impôts, sur le salaire, au fisc luxembourgeois à condition qu’il ne dépasse pas 24 jours de travail hors du territoire luxembourgeois (à partir du 25e jour, les 25 jours passés hors du Luxembourg deviennent donc imposables en Belgique).

Les congés (de maladie, parental ou de récréation) ne sont pas pris en compte pour apprécier si le seuil des 24 jours peut être atteint.

Par contre, il faut donc bien noter que le télétravail va être retenu pour ce seuil de 24 jours. Le télétravail étant considéré par le fisc comme du travail hors du territoire luxembourgeois comme toutes autres missions «étrangères» effectuées par le salarié.

Charge de la preuve

En matière fiscale, le contribuable supporte la charge de la preuve. Ceci implique que c’est au frontalier à justifier s’il a bien presté ou non son travail physiquement sur le sol du Grand-Duché.

On connait malheureusement l’acharnement de certains fonctionnaires du fisc belge qui demandaient des preuves et des preuves sans jamais accepter celles-ci, remettant sans cesse en doute l’honnêteté de certains frontaliers.

L’OGBL a sollicité à maintes reprises les politiques des deux côtés de la frontière afin que ne cesse ce harcèlement «fiscal» envers les travailleurs frontaliers.

Un Vade-mecum vient d’être publié fin juin par le SPF Finances (voir son site internet Fisconetplus) et tend à expliquer quel type de preuves sera demandé aux contribuables frontaliers:

Définition de l’activité du travailleur frontalier:
Trois gradations sont reprises dans ce mémento quant à l’activité du salarié:

  1. Les salariés qui exercent une activité pour laquelle la présence sur le lieu de travail est indispensable, par exemple: la caissière d’un magasin, l’infirmier dans un hôpital, l’ouvrier d’usine, …
    Pour ces salariés «sédentaires», il suffira de présenter le contrat de travail (ou une attestation patronale) dans lequel sera clairement mentionné les fonctions exercées et l’endroit d’exécution.
  2. Les salariés qui exercent une activité dont la présence sur un lieu de travail fixe n’est pas exigée, par exemple: le représentant de commerce, le technicien itinérant, le chauffeur routier (s’il n’est pas chauffeur inter), …
  3. Les salariés qui exercent une activité pour laquelle le travail peut être exécuté sur le lieu de travail fixe, mais peut aussi nécessiter de travailler en déplacement. Exemples: l’ouvrier de chantier, le conseiller, le comptable, le salarié d’une multinationale, …

De manière générale, pour ces salariés «itinérants» ou «semi itinérants» repris en 2 et 3, le contrat de travail ne suffira pas comme preuve. Ces personnes doivent pouvoir fournir annuellement une preuve de leur présence physique sur le territoire luxembourgeois. Voici quelques preuves reprises dans le Vade-mecum: kilométrage véhicule, factures GSM, documents des endroits de chantiers, comptes rendus de réunions, factures de téléphonie mobile (roaming), pointage nominatif, listes de présence à des réunions, preuves d’achats divers au Luxembourg dont notamment le carburant, tickets de parking, …

On se rend compte que tout n’est pas réglé quant à la charge de la preuve. Les frontaliers vont devoir continuer à emmagasiner toute une série de documents prouvant leur présence physique au Luxembourg. L’OGBL déplore ce manque de clarté dans cette élaboration de la charge de la preuve. Car, au vu des expériences passées, il est certain qu’un fonctionnaire zélé pourra toujours continuer à s’acharner sur un contribuable jusqu’à devoir, pour le frontalier, se retrouver devant la justice pour faire valoir ses droits.

L’OGBL va donc continuer à interpeller les responsables politiques afin de mettre un terme à cette chasse aux sorcières. Chaque frontalier doit pouvoir effectuer son travail sereinement sans se sentir «coupable» d’avoir accepté du travail hors de son pays de résidence.


1  en 2014, 2584 travailleurs frontaliers belges ont dû se justifier auprès du fisc belge quant à leur présence physique sur le sol luxembourgeois pour l’exécution de leur travail