Convention fiscale franco-luxembourgeoise

Une bonne nouvelle peut-elle en cacher une moins bonne?

Un nouveau sursis a été accordé aux travailleurs frontaliers français ayant des revenus mixtes quant à l’application de la convention fiscale entre la France et le Luxembourg qui a été signée en 2018 et ratifiée en 2019.

Cette année, les frontaliers français pourront en effet encore déclarer en France leur revenu luxembourgeois (pour l’année fiscale 2023), après déduction des cotisations sociales et de l’impôt payé au Luxembourg. Mais ce sera la dernière fois, a prévenu le ministère français des Finances. Cette année, la méthode dite «du taux effectif» s’appliquera donc encore pour ceux qui ont des revenus mixtes (français et luxembourgeois).

Concernant le nouveau principe contenu dans la convention signée en 2018, le système prévoit un crédit d’impôt (méthode de l’imputation) dans lequel seules les cotisations sociales seront déduites du revenu luxembourgeois à déclarer en France au titre du «revenu mondial». Ensuite l’impôt français sera calculé sur la totalité des revenus auquel on retranchera l’impôt déjà payé au Luxembourg sous forme de crédit d’impôt censé neutraliser la charge fiscale française.

Pour éviter une double imposition «forte», le résident français bénéficiera d’un crédit d’impôt égal au montant de l’impôt payé au Luxembourg qui sera imputé sur l’impôt dû en France.

Si le ministre français de l’Economie, Bruno Lemaire, a bien déclaré publiquement que la convention n’aurait pas d’impact, l’OGBL souligne pour sa part que cette méthode n’est pas neutre et d’ailleurs, en 2020, lors de la tentative finalement avortée, certains contribuables avaient vu leur charge fiscale augmentée de quelques centaines à plusieurs milliers d’euros selon les cas.

L’impact négatif sur les frontaliers français devrait être d’autant plus grand lorsque le niveau du revenu provenant du Luxembourg s’avère être bien supérieur au revenu médian et que le revenu français est lui beaucoup plus faible. Ceci risque d’être le cas de nombreux ménages frontaliers français ayant des revenus mixtes, qu’il s’agisse de salaires mais aussi de pensions, surtout lorsqu’on sait qu’une année cotisée au Luxembourg en matière de pensions équivaut financièrement en moyenne à 4-5 années en France!

Où est la neutralité dans tout cela?

Avec cette nouvelle méthode de mondialisation voulue par le gouvernement français, trois situations se profilent:

  • plus les revenus seront élevés du côté luxembourgeois et bas du côté français, plus l’impôt va augmenter
  • une hausse d’impôt moins importante en cas de revenus équilibrés
  • pas ou peu d’impact si les revenus français sont élevés par rapport aux revenus luxembourgeois

Il est important de rappeler que les frontaliers français n’ayant aucun revenu provenant de France ne sont pas concernés par cette nouvelle méthode de calcul. En revanche, les résidents luxembourgeois ayant des revenus français pourront être impactés.
Une étude d’impact a été commandée par le ministère français des Finances, mais les résultats n’ont pour l’heure jamais été diffusés. Par conséquent, les répercussions précises ne sont pas connues.

L’OGBL, qui est intervenu dès le début de cette affaire, revendique de la transparence et demande que cette d’étude d’impact, au nom de l’équité fiscale, soit enfin publiée. Enfin l’OGBL demande que le ministre français des Finances respecte ses engagements, à savoir que l’application de la nouvelle convention s’avère neutre pour l’ensemble des personnes concernées.

L’article a été publié dans l’Aktuell (3/2024)