Il est temps d’aligner la stratégie d’investissement du FDC sur la politique générale du Luxembourg, ainsi que sur la volonté des assurés : dites NON au nucléaire !

Lettre ouverte au Ministre de la Sécurité sociale, Monsieur Claude Haagen et aux Membres du Conseil d’Administration du Fonds de Compensation Commun au Régime Général des Pensions (FDC) 

Monsieur le Ministre, Madame et Messieurs les membres du Conseil d’Administration du FDC,

Dans un avenir proche, le Fonds de Compensation au Régime Général des Pensions (FDC) doit arrêter sa stratégie d’investissement pour la période 2023-2027. Cette stratégie s’imposera aux gérants externes des différents compartiments, gérants mandatés par le FDC.

C’est dans ce contexte que le Comité National d’Action contre le Nucléaire – représentant plus de 20 organisations non-gouvernementales, des partis et mouvements politiques ainsi que les principaux syndicats du pays – vous demande d’exclure, dans le cadre de cette future stratégie, tout investissement dans l’industrie nucléaire.

Selon les derniers chiffres à notre disposition, les investissements du FDC dans l’industrie nucléaire s’élevaient à plus de 800 millions € fin 2021, représentant quelque 3% de l’investi total. Au moins 219 entreprises du secteur nucléaire mondial ont ainsi bénéficié de fonds provenant du FDC !

Compte tenu du fait qu’il s’agit d’argent public, cette situation est intenable quand on sait que le Luxembourg, dans sa politique au niveau tant national qu’international, s’oppose à l’énergie nucléaire, et ceci pour de très bonnes raisons : le nucléaire non seulement représente un danger grave pour notre pays, mais aussi est une source d’énergie ni écologique, ni neutre pour le climat.

Il est grand temps que l’État et les fonds publics sortent définitivement de cette industrie néfaste ! Une première étape concernant le FDC doit être l’exclusion du secteur nucléaire de sa stratégie d’investissement 2023-2027.

Si ensuite, dans un deuxième temps, des amendements à la loi modifiée du 6 mai 2004 régissant le FDC s’avéraient nécessaires afin de garantir le caractère durable de sa politique d’investissement, le Comité National d’Action contre le Nucléaire vous suggère d’initier des débats et réflexions constructifs à ce sujet dans les mois à venir.

Dans l’espoir que notre demande d’exclure le nucléaire de la stratégie d’investissement 2023-2027 du FDC trouvera un accueil favorable, nous vous prions, Monsieur le Ministre, Madame et Messieurs les membres du C.A., de croire à nos sentiments les meilleurs.

Communiqué par le Comité national d’action contre le nucléaire*le 13 décembre 2022

*Mouvement Ecologique, Greenpeace, OGBL, LSAP, déi gréng, Forum, déi jonk gréng, DP, FGFC, Luxemburger Kommission Justitia et Pax, LCGB, Lëtzebuerger Guiden a Scouten, Fairtrade Lëtzebuerg asbl, déi Lénk, déi Jonk Lénk, Klima-Bündnis Lëtzebuerg, Eurosolar Lëtzebuerg, Syprolux, natur&ëmwelt asbl, Friddens- a Solidaritéitsplattform asbl, Ligue CTF, Piratepartei, JSL-jonk Sozialisten, FNCTTFEL-Landesverband.

Vers une amélioration des transports en commun pour les travailleurs postés?

Une délégation de l’OGBL, composée de représentants des syndicats de l’industrie et des transports, a été reçue le 13 décembre 2022 par le ministre de la Mobilité, François Bausch, suite à la décision du ministère de supprimer toutes les lignes desservant les sites industriels aux heures de changement de poste.

Lors de cette réunion, l’OGBL et plusieurs de ses délégués du personnel provenant d’entreprises directement impactées par cette décision, comme CEBI à Steinsel et Goodyear à Colmar-Berg, ont insisté sur les conséquences de cette décision pour les salariés concernés, qui se retrouveront le cas échéant sans véritable alternative pour aller travailler. Les bus en question, spécialement organisés pour desservir les sites industriels, constituent en effet le seul moyen de se rendre sur leur lieu de travail pour nombre de salariés.

Le ministre a motivé sa décision par une réorganisation générale du réseau de lignes desservant les sites industriels en raison d’une faible fréquentation de celles-ci. D’après le ministre, la réorganisation doit permettre une meilleure qualité des transports en commun, comprenant des solutions mieux adaptées aux besoins des utilisateurs.

Pour l’OGBL, cette réorganisation des transports en commun ne peut toutefois se faire que si les salariés disposent de la garantie qu’aucun d’entre eux ne se retrouvera sans solution à partir du 12 février 2023. Sur base de l’intervention de l’OGBL, le ministre s’est engagé à ne pas supprimer de lignes avant qu’une alternative ait été trouvée dans le cadre du dialogue social.

Mise en place de plans de mobilité
Dans un premier temps, le ministre a identifié quatre pôles prioritaires ayant des besoins de mobilité spécifiques: Goodyear à Colmar-Berg ainsi que les zones d’activités à Bissen, Bettembourg et Steinsel. Par la mise en place de plans de mobilité spécifiques adaptés aux besoins des entreprises, la qualité du transport pour les salariés devrait ainsi être adaptée et améliorée. Un sondage sera organisé au sein des entreprises concernées pour mieux refléter les besoins.

Les autres sites industriels à travers le pays ne sont pas oubliés pour autant. Le ministre a ainsi rappelé que des plans de mobilité pourront être mis en place par la suite en collaboration avec les employeurs, également sur d’autres sites qui ne sont pas encore desservis pour le moment.

Responsabiliser les employeurs !
Par le passé, les employeurs ont trop souvent négligé les problèmes de mobilité auxquels leurs salariés peuvent être confrontés et n’ont jamais mis les transports en commun en avant. L’OGBL et le ministre se sont ainsi mis d’accord sur la nécessité de responsabiliser les employeurs en vue de l’organisation et du financement des transports en commun destinés aux sites industriels.

Une prochaine réunion avec le ministre aura lieu le 1er février 2023 afin d’assurer le suivi de ce dossier.

Communiqué par les syndicats Chimie, Transformation sur métaux et Transport sur Route & Navigation/ACAL  de l’OGBL, le 13 décembre 2022

“Des mesures insuffisantes pour faire face à la crise du logement”

La coalition Wunnrecht, qui regroupe une vingtaine d’associations ainsi que des citoyens individuels, s’est constituée en septembre 2020 pour dénoncer la crise aigüe du logement et défendre le droit au logement. Elle a notamment organisé deux manifestations nationales pour le droit à un logement digne et abordable le 10 octobre 2020 et le 27 mars 2021.

À la suite de ces manifestations, la coalition a eu en mars 2022 deux entrevues perçues comme constructives avec le Ministre du Logement Henri Kox, par rapport aux différents chantiers à aborder dans le domaine du logement. Le Ministre soulignait à cette occasion le fait de partager notre constat de l’état d’urgence au niveau du logement et donnait aussi des indications sur les initiatives législatives qu’il comptait prendre dans les mois à venir.

Au mois d’octobre, à l’occasion de la Semaine nationale du logement, le gouvernement a effectivement présenté plusieurs initiatives législatives dans le domaine du logement, d’une part des amendements au projet de loi sur le bail à loyer, d’autre part la réforme attendue depuis longtemps de l’impôt foncier, combinée à de nouvelles taxes qui ont l’objectif affiché de lutter contre la spéculation foncière.

Malheureusement, les deux projets restent largement en-deçà de ce qui serait vraiment nécessaire, et, à certains égards, risquent même de rendre l’accès à un logement digne et abordable encore plus difficile !

La révision du projet de loi sur le bail à loyer, dont la première version restait largement insuffisante pour vraiment permettre d’agir contre la hausse faramineuse des loyers, était effectivement une revendication centrale de la coalition Wunnrecht. Les amendements introduits par le gouvernement améliorent certes, sur certains points, le projet de loi par rapport à la première mouture, mais comportent un changement d’orientation majeur, qui détérioreraient la situation s’ils étaient adoptés tels quels.

Ainsi, le Ministre du Logement a finalement concédé que le plafond actuel de 5% du capital investi, en place depuis les années 1950, ne correspond plus à la réalité du marché. Il s’est donc proposé de le baisser à 3,5%, voire à 3% du capital investi pour les logements qui forment des passoires thermiques et ne correspondent pas aux exigences actuelles d’efficacité énergétique. La coalition Wunnrecht estime qu’une prise en compte d’autres facteurs, dont notamment l’évolution générale des salaires et du coût de la vie, pour l’établissement réel du montant d’un loyer constituerait une véritable adaptation de la loi du bail à loyer.

Même si cet abaissement du plafond pourrait être perçu a priori comme un pas en avant, il constitue en réalité un pas en arrière, puisque le gouvernement change en même temps de mode de calcul de l’adaptation du capital investi au fil des années. De ce fait, le gouvernement finalement ne met pas de frein aux loyers souvent déjà surélevés sur le marché actuel, mais il remplace à vrai dire la notion de capital investi par celle d’évolution du marché.

Les cas concrets publiés par le Ministère prouvent que la proposition du gouvernement ne change absolument rien à la situation générale des loyers courants, car ceux-ci sont inférieurs au loyer maximal que le projet de loi du gouvernement doit permettre, alors que de nombreux ménages locataires ont déjà atteint depuis longtemps la limite de leur capacité financière. Dans certains cas, le plafond du capital investi pourra même être quatre fois plus élevé que le plafond actuel. Ceci vaut en particulier pour des logements vieux et souvent mal isolés.

Donc, il s’agit d’une modification qui va totalement à l’encontre de l’objectif affiché d’améliorer l’accès à un logement digne et abordable.

Aux yeux de la coalition Wunnrecht, le Ministre a fait complètement fausse route et doit réviser une seconde fois son projet de loi.

La coalition Wunnrecht regrette par ailleurs que le gouvernement n’ait pas choisi de prévoir une prise en charge intégrale des frais d’agence par le propriétaire, même si la participation à 50% du locataire et du propriétaire constitue toutefois déjà une amélioration par rapport à la situation actuelle.

La coalition Wunnrecht reste également sur sa faim en ce qui concerne le projet de réforme de l’impôt foncier. Ce projet, en attente depuis des décennies, a certes déjà l’avantage d’exister. La base de calcul de 1941 n’était certainement plus tenable et une réforme généralisée de l’impôt foncier était nécessaire depuis longtemps.

Par ailleurs, l’instauration de deux nouveaux impôts nationaux contre la spéculation, respectivement l’impôt sur la mobilisation des terrains ainsi que l’impôt sur la non-occupation des logements, répondent globalement à une revendication de la coalition. En effet, les actuels impôts communaux sur les logements inoccupés ne sont appliqués que dans quelques communes, et se sont avérés peu efficaces. La nécessité d’un impôt national, et non facultatif, était une évidence depuis longtemps. Le problème toutefois est que les nouveaux impôts ne seront pleinement effectifs qu’en 2037, alors que la situation du marché du logement est déjà exacerbée à présent !

La coalition Wunnrecht regrette par ailleurs que le gouvernement prévoit certes une progressivité dans le temps (par rapport à la durée où le terrain ou le logement ne sont pas sur le marché), mais non par rapport à la superficie et au nombre de biens immobiliers aux mains d’un seul propriétaire.

Sur ce point, le gouvernement manque de courage politique pour s’attaquer à cette tendance accrue d’une concentration de propriétés immobilières entre quelques mains. Pour rappel, selon une étude du LISER publiée en 20191, 159 personnes physiques détenaient à elles seules un quart (25,1%) de la valeur des possessions foncières disponibles aux particuliers !

Le grand absent des projets gouvernementaux, c’est un véritable plan de création de logements à coût modéré, de logements pour les couches de la population les plus vulnérables telles que les primo-arrivants, les bénéficiaires de protection internationale, sans oublier les familles monoparentales ou étudiants. Pour toutes ces populations, l’offre de logements à coûts abordables reste largement insuffisante. Dans un futur proche, même une couche plus aisée de la population se retrouvera impactée par un marché de l’immobilier saturé et inabordable. Cette inaction forme une faute politique dont les conséquences pèsent déjà lourdement sur un grand nombre de ménages.

Le seul point positif que la coalition Wunnrecht voudrait saluer, est le dépôt d’un projet de loi – passé quelque peu inaperçu par rapport aux autres mesures – portant sur la suspension des déguerpissements jusqu’au 31 mars 2023. Dans le contexte actuel d’une crise énergétique et du pouvoir d’achat, il convient d’admettre qu’il s’agit d’une mesure de première nécessité afin d’éviter des situations de précarité sociale extrêmes. Mais comme cette loi de seulement quelques phrases n’est toujours pas avisée par le Conseil d’Etat et ne peut pas encore être votée à la Chambre des Députés, elle perd toute son utilité et nous déplorons de ce fait que des personnes soient mises actuellement devant la porte en plein hiver.

Communiqué par la Coalition Wunnrecht, le 09 décembre 2022.


1 Voir la Note 23 de l’Observatoire de l’habitat, Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (LISER), « Le degré de concentration de la détention du potentiel foncier destiné à l’habitat en 2016 », Note23-A4.pdf. Voir aussi les conclusions en résumé : https://liser.elsevierpure.com/en/publications/le-degr%C3%A9-de-concentration-de-la-d%C3%A9tention-du-potentiel-foncier-de.

Comme d’habitude, l’OCDE s’attaque à nouveau au système social luxembourgeois

blablablaRécemment, le Luxembourg a eu la visite du secrétaire général de l’OCDE, Mathias Cormann qui a succédé en 2021 à Angel Gurria à ce poste. Mathias Cormann était auparavant ministre en Australie pour le compte du Parti libéral australien (jusqu’à la victoire du Parti travailliste en 2019). Lors de son accession au poste de secrétaire général de l’OCDE, Mathias Cormann a été fermement critiqué par la Confédération européenne des syndicats (CES), très préoccupée par la désignation de ce néolibéral pur et dur.

Les propos tenus par Mathias Cormann à l’occasion de sa visite au Luxembourg ont hélas totalement confirmés les inquiétudes de la CES à son sujet. En effet, présentant l’étude économique de l’OCDE concernant le Luxembourg, le nouveau secrétaire général a utilisé la tribune pour se livrer à une attaque en règle contre deux éléments-clé du système social luxembourgeois: l’index, évidemment, mais aussi le régime public des pensions.
A l’écouter, l’index nuirait à la compétitivité de l’économie luxembourgeoise, il «auto-allumerait» l’inflation et rendrait, à ce qu’il semble, un contrôle des prix plus difficile. On connaît la rengaine…

Le secrétaire général est même allé jusqu’à proposer la mesure prise en Belgique, contre laquelle les syndicats belges viennent d’organiser une journée de grève générale largement suivie, consistant à mettre en place un plafond à la croissance des salaires («norme salariale»).

Visiblement, l’OCDE ignore tout du débat qui s’est tenu cette année au Luxembourg, avec la manipulation de l’index lors de la tripartite de mars 2022, la résistance de l’OGBL à cette manipulation pendant plusieurs mois et finalement la conclusion d’un accord tripartite en septembre, prévoyant le rétablissement du fonctionnement normal du mécanisme. Son secrétaire général estime apparemment qu’il faut rompre encore davantage la paix sociale dans le pays.

Le vieux refrain de l’«auto-allumage» (variante de la prétendue «spirale salaires-prix») sert ici à nouveau un projet de démantèlement social, alors que dans les faits, il a été largement démontré que le soi-disant effet d’«autoallumage» s’avère faux. Ainsi, le Statec estime que cet effet conduit à une hausse des prix de… 0,2%. Et le fait même que le Luxembourg connaisse actuellement une inflation bien inférieure à d’autres pays européens qui ne disposent pas de système d’indexation démontre à lui seul que cette prétention ne reflète pas la réalité.

Heureusement — et c’est assez rare pour le souligner — les ministres des Finances, de l’Economie et de l’Energie, présents lors de la présentation de l’étude économique, ont contredit Mathias Cormann sur la question de l’index. Sans aucun doute, après les âpres discussions menées lors de la tripartite, les membres du gouvernement n’ont pas souhaité se lancer dans une nouvelle bataille de plusieurs mois avec l’OGBL.

On peut toutefois regretter que les trois ministres n’aient pas également contredit le secrétaire général de l’OCDE quant aux pensions. L’australien a effectivement remis en question les différents modèles de préretraite, a prétendu qu’une «grande partie» des hommes luxembourgeois partiraient en pension déjà à 54 ans (ce qui est totalement faux), a préconisé une augmentation général de l’âge légal de départ en retraite et a enfin dépeint le fameux scénario-catastrophe… pour 2070!

Ici aussi, on connaît la rengaine. Combien de fois le fameux «mur des pensions» a-t-il déjà été annoncé, sans que personne ne l’ait jamais aperçu? Le but de toutes ces propositions demeure toujours même: démanteler le régime public de pensions pour mieux promouvoir les systèmes de pensions complémentaires privées.

Les recettes préconisées par Mathias Cormann et l’OCDE ont fait naufrage depuis bien longtemps. La crise économique et financière de 2008 et la politique d’austérité néfaste qui l’a prolongée, l’ont démontré à outrance. Il est grand temps d’entonner une autre chansons après les crises de ces dernières années.

Cet article est paru initialement dans le magazine Aktuell  (#5 – 2022)

Le rétablissement de l’équilibre financier de la CNS ne doit pas se faire au détriment des assurés

Lors de la dernière réunion du Comité quadripartite qui s‘est tenue le 19 octobre, l‘OGBL a tenu à souligner qu’une vision progressiste et tournée vers l‘avenir de notre système de santé publique et solidaire doit prévoir son renforcement et son développement.

L’OGBL s’est toujours engagé et continuera à s’engager en vue du renforcement du système de santé luxembourgeois, afin qu’il soit préparé au mieux pour tous les défis futurs et qu’il garantisse aussi impérativement un certain nombre de valeurs et de principes fondamentaux, à savoir:

  • un accès universel et équitable au système de santé universel pour toute personne le nécessitant;
  • des services et des soins de santé de qualité, adaptés aux besoins individuels des patients, fournis par des professionnels de santé formés et dispensés dans un délai raisonnable;
  • la garantie de la liberté du choix du patient éclairé et de la liberté thérapeutique du prestataire responsable;
  • une prise en charge financière basée sur le principe de solidarité.
  • un système qui garantit et qui doit continuer de garantir des conditions de travail et de salaire optimales pour tous les salariés du secteur

Ces éléments sont indissociablement liés les uns aux autres, de sorte que la mise en cause de l’un d’entre eux remet en question le système de soins de santé dans son intégralité et ainsi la cohésion sociale du pays.

A l’ordre du jour de la réunion du Comité quadripartite figurait tout d’abord une analyse de la situation financière de l’assurance maladie-maternité (AMM) de la Caisse nationale de santé (CNS). Il en ressort que les dépenses de la CNS pour l’année 2022 s’avèrent plus élevées que les recettes. Le déficit pour 2022 s’élève ainsi à 55,3 millions d’euros.

Selon les estimations, le budget de l’AMM pour 2023 devrait probablement aussi se solder par un déficit, de l’ordre de 9,7 millions d’euros cette fois-ci. Des déficits qui seront absorbés par la réserve de la CNS qui, à l’issue de l’exercice 2023, devrait encore afficher un montant de 838,2 millions d’euros.

S’il est vrai que le budget de l’assurance maladie-maternité, le solde des opérations courantes pour être plus précis, présente un déficit pour la quatrième année consécutive, il faut toutefois noter que la réserve, qui demeure encore relativement importante, laisse le temps pour analyser la situation en vue de contrecarrer ce déficit structurel. Un groupe de travail, composé conformément au principe du décideur-payeur, a été mis en place pour mener une analyse qui doit être présentée lors de la prochaine réunion du Comité quadripartite au printemps 2023. L’OGBL s’engage à ce que les efforts pour rétablir l’équilibre financier de l’AMM ne se fasse pas au détriment des assurés, c’est-à-dire par exemple par une détérioration des prestations de soins de santé ou l’introduction d’un jour de carence en cas d’incapacité de travail.

Lors de la réunion du Comité quadripartie, l’OGBL a également insisté sur le fait que la dotation financière annuelle de l’Etat consacrée à l’assurance maternité de
20 millions d’euros n’est plus suffisante, et ce depuis des années. Cette dotation est censée compenser les charges supplémentaires incombant à la CNS, en raison de l’incorporation dans le régime, des prestations en espèces de maternité. Pour l’OGBL, il est également incompréhensible, qu’après 2023, le budget pluriannuel de l’Etat ne prévoie plus de dotation annuelle pour les années à venir. Selon l’OGBL, il est indispensable de procéder à un exercice de vérification («Kassensturz») pour adapter le montant de la dotation annuelle de maternité afin de compenser la charge réelle de la CNS. Ceci constituerait, entre autres, une piste à explorer en vue de rétablir l’équilibre financier de l’AMM de la CNS pour les années à venir.

Le Comité quadripartite a également procédé à un état des lieux concernant la compensation financière des mesures prises dans le cadre de la crise sanitaire liée au Covid-19. Les dépenses se chiffrent actuellement à environ un demi-milliard d’euros. A cette somme, il faut encore ajouter les diverses dépenses liées à la pandémie, non-couvertes par la participation de l’Etat, mais financées par la CNS.

Un autre point traité lors de la réunion du 19 octobre portait sur les nouvelles prestations en matière de médecine dentaire, dont un état des lieux des travaux en cours a été dressé. En 2017, il avait été décidé de mettre une enveloppe à disposition d’un montant de 12,4 millions d’euros en vue de nouvelles prestations dentaires. Mais une mise à disposition financière ne signifie pas forcément que de nouvelles prestations ou de meilleures prises en charge soient appliquées tout de suite. En effet, seule l’extension du remboursement à un deuxième détartrage par an a pour l’instant été mise en place.

Concernant les autres améliorations en matière de prestations dentaires, un catalogue des actes de parodontologies, endodontie et implantologie en cas de maladies rares a pu être établi entretemps et doit désormais encore passer en commission de nomenclature avant que les assurés puissent en bénéficier. Des négociations entre la CNS et les médecins-dentistes sont également toujours en cours, surtout concernant la prise en charge et l’ajout à la nomenclature d’actes comme le «comblement des sillons», voire les matériaux d’obturation et de préparation cavitaire («Wäisse Plomb»). Il est à espérer que les travaux s’amplifient au cours des prochaines semaines afin que les assurés puissent enfin bénéficier également de ces nouveaux remboursements qui ont été décidés il y a déjà 5 ans!

Outre les autres points classiques traités lors de la réunion du Comité quadripartite, l’OGBL a également demandé la création d’un groupe de travail portant sur la Coordination des séjours d’hospitalisation du patient avec l’ensemble des médecins, y compris le personnel soignant des établissements hospitaliers.

Le patient doit en effet être placé au centre des préoccupations dans le cadre du parcours de soins, notamment au niveau de la sécurité et de la qualité de la prise en charge en milieu hospitalier. Il est important d’impliquer le patient dans la prise de décision portant sur ses propres soins de santé.  Malheureusement, ces derniers temps, l’OGBL a de plus en plus l’impression que le système de santé s’oriente davantage vers les besoins des médecins et non des patients.

Selon l’OGBL, un système fondé sur le principe de l’atteinte des résultats ne serait pas recommandé, car dans ce cas, des améliorations ne seraient possibles que concernant des points mesurables et, par conséquent, le temps passé auprès du patient serait lui difficilement mesurable, alors qu’il est d’une importance cruciale.

S’y ajoute que, sur le terrain, des milliers de soignants s’engagent au quotidien pour prester des soins de qualité aux patients hospitalisés. Ces derniers sont toutefois de plus en plus souvent en sous-effectif. Dans ce contexte, l’OGBL revendique l’introduction de dotations minimales en personnel dans le secteur de la santé qui devraient définir, d’une part, la clé de répartition du personnel par rapport au nombre de lits et, d’autre part, les qualifications du personnel soignant en nombre suffisamment élevé.

Il faut savoir que les salariés sont soumis à une densité de travail croissante et que de telles dotations minimales permettraient, même à court terme, de contrer cette pression, par exemple en augmentant, pour ceux qui le souhaitent, le nombre d’heures des salariés en contrat à temps partiel ou en mettant fin à des pratiques courantes de contrats à durée déterminée dans le secteur.

Un autre point soulevé par l’OGBL a consisté dans la demande de réactivation du groupe de travail portant sur le désengorgement des services d’urgence. En 2018, un groupe de travail portant sur le désengorgement des urgences avait été mis en place. Celui-ci avait siégé jusqu’au début de la pandémie.

Des mesures d’amélioration avancées par ce groupe de travail ont été transposées, cependant une stratégie nationale portant sur le fonctionnement des services d’urgence (hôpitaux & maisons médicales) fait toujours défaut. Diverses pistes ont été explorées, mais celles-ci n’ont pas apporté le succès escompté. Les patients sont en effet toujours confrontés à de longs délais d’attente ainsi qu’à des salles d’attentes inadéquates à leurs besoins. Ceci a d’ailleurs été confirmé par la Fédération des hôpitaux luxembourgeois (FHL): il y a eu ces deux dernières années une augmentation de 25 % des passages aux urgences, dont 50 % auraient pu être réorientés vers un médecin généraliste voire une maison médicale.

La ministre de la Santé, Paulette Lenert, a annoncé que ce groupe de travail serait réactivé au courant du mois de novembre. Or, sauf erreur de notre part, à ce jour, aucune invitation à une réunion de ce groupe de travail n’a été adressée aux acteurs concernés. Par ailleurs, la ministre a informé que les heures d’ouverture des maisons médicales seraient revues et adaptées afin de désencombrer les urgences des établissements hospitaliers. L’idée avancée par l’OGBL pour remédier davantage à cette situation consiste non seulement à étendre les heures d’ouverture des maisons médicales existantes, mais aussi à intégrer une maison médicale dans chaque établissement hospitalier, comme c’est déjà le cas pour la Kannerklinik au CHL.

Sachant que le bon fonctionnement global des services d’urgence offerts au patient constitue la carte de visite du système de santé, il est nécessaire de se concerter dans les plus brefs délais pour trouver la solution qui assurera une prise en charge optimale.

Cet article est paru initialement dans le magazine Aktuell  (#5 – 2022)

 

Les urgences sociales restent nombreuses et le gouvernement a encore le temps d’agir!

La dernière tripartite est venue apporter un certain nombre de réponses nécessaires à une situation de crise aiguë du pouvoir d’achat à laquelle il fallait réagir très rapidement. Grâce à la détermination de l’OGBL, elle a notamment permis de corriger l’erreur de la tripartie précédente qui avait débouché sur une manipulation massive et inacceptable de l’index. Mais pour autant, les urgences sociales auxquelles le pays doit faire face restent encore très nombreuses. Il s’agirait pour le gouvernement de ne pas les oublier.

Dans ce contexte, l’OGBL constate que le récent discours sur l’état de la nation du Premier ministre ainsi que le projet de budget de l’Etat pour 2023 présenté par la ministre des Finances sont loin d’être à la hauteur des enjeux. Réuni le 24 octobre dernier, le Comité exécutif de l’OGBL a ainsi jugé totalement incompréhensible que ni le Premier ministre ni la ministre des Finances n’aient dit un mot, lors de leurs interventions respectives, quant à la pauvreté rampante et les inégalités qui se creusent dans le pays, alors même que de plus en plus de ménages peinent à joindre les deux bouts.

L’OGBL salue évidemment l’accent fortement mis sur l’écologie pendant le discours sur l’état de la nation, mais il ne peut s’en contenter au regard de toutes les autres urgences sociales que rencontre le pays. Oui, il y a une urgence climatique. L’OGBL l’a prend très au sérieux et soutient d’ailleurs toutes les initiatives visant à atteindre les objectifs retenus dans l’accord de Paris, mais il y a parallèlement aussi d’autres priorités que le gouvernement ne peut pas simplement ignoré et auxquelles il doit s’atteler. Or, sur ce terrain, l’OGBL observe que le gouvernement ne propose aucune nouvelle initiative majeure, alors qu’il y aurait tant à faire.

A commencer par le droit du travail. Tout le monde est conscient que le monde du travail est aujourd’hui en pleine mutation. Dans ce contexte, le droit du travail doit donc lui aussi absolument évoluer pour s’adapter aux nouvelles réalités. On peut citer l’exemple des travailleurs des plateformes numériques (Crowdworkers, Clickworkers, Microworkers, AppJobber…) qui ont besoin d’un cadre légal adapté à ces nouvelles façons de travailler. Mais pas seulement. L’OGBL avait par exemple salué un certain nombre d’engagements pris par le gouvernement en 2018 dans le cadre de son programme de coalition, mais qui hélas n’ont toujours pas été réalisés. Ainsi, le gouvernement n’a pris au cours de son mandat aucune initiative législative visant à mieux pouvoir concilier vie privée et vie professionnelle. Rien non plus concernant une nécessaire réduction du temps de travail. Il n’y a toujours pas non plus de projet de réforme de la loi sur les plans sociaux en vue, ni concernant la loi relative aux conventions collectives qui est presque obsolète, alors que 50% des salariés dans le pays ne bénéficient aujourd’hui toujours pas de convention collective et que même l’Union européenne et l’OCDE les promeuvent désormais.
Une autre priorité du gouvernement devrait porter sur la fiscalité. Le système actuel demeure profondément injuste. Les revenus du travail, c’est-à-dire les salaires, sont imposés jusqu’à quatre fois plus que les revenus du capital: dividendes, revenus d’intérêts, participations aux bénéfices, etc. Il est donc est urgent de rétablir davantage de justice fiscale.

L’OGBL revendique en matière fiscale tout d’abord l’introduction d’un mécanisme d’adaptation automatique du barème fiscal à l’inflation. En effet, en l’absence d’un tel mécanisme, à chaque fois que les revenus des ménages progressent, les ménages subissent directement des hausses d’impôts injustifiées et donc des pertes de pouvoir d’achat. Ce phénomène baptisé «progression à froid» touche principalement les classes de revenus inférieures et moyennes.

Ce n’est ici qu’une des nombreuses revendications de l’OGBL. Il y aurait en effet tant à faire sur ce plan.

Et la liste des autres dossiers prioritaires auxquels le gouvernement devrait s’attaquer d’urgence est longue — très longue, même! L’OGBL tient à souligner dans ce contexte que d’ici les prochaines élections nationales, c’est-à-dire d’ici octobre 2023, le gouvernement a encore largement le temps d’agir! (Voir également notre dossier: Quatre ans plus tard – Les engagements du gouvernement repassés à la loupe)

Le gouvernement dispose par ailleurs aussi des marges nécessaires pour entreprendre un certain nombre de mesures. Ainsi, même si les finances publiques ont certes souffert en raison du Covid-19 et des mesures prises afin de lutter contre la flambée des prix de l’énergie, comme le montre la CSL dans son récent avis relatif au projet de budget 2023, la situation dans laquelle se trouvent les finances publiques apparaît bien meilleure qu’annoncée et permettrait d’adopter une politique budgétaire contracyclique qui s’avère indispensable pour éviter une récession persistante. La politique budgétaire devrait ainsi et avant tout davantage soutenir les ménages par une hausse des dépenses sociales et un renforcement de leur pouvoir d’achat.

Cet article est paru initialement dans le magazine Aktuell  (#5 – 2022)