Hausse des déguerpissements… et du nombre de sans-abris : La crise du coronavirus fait apparaître au grand jour l’explosion des inégalités

Au début de l’état de crise, au mois de mars, l’OGBL avait réclamé des mesures d’urgence pour endiguer les conséquences directes du confinement sur les populations les plus démunies: un gel des loyers, un arrêt provisoire des déguerpissements et une interdiction temporaire d’interruption de l’approvisionnement en eau, gaz, électricité et télécommunications. Le gouvernement y avait répondu en partie positivement, en suspendant effectivement pendant la durée de l’état de crise les déguerpissements en matière de bail à usage d’habitation et à usage commercial et en prévoyant un arrêt des augmentations de loyer jusqu’au 31 décembre 2020.

Ces mesures ont effectivement permis d’éviter que des personnes ne se retrouvent à la rue en plein «lockdown», avec un risque accru d’infection au coronavirus. Or, désormais, alors que les chiffres d’infection publiés sont encore plus importants qu’en mars-avril, nous assistons à la situation inverse. Non seulement, le gouvernement ne prévoit rien dans le cadre de ses «lois Covid-19» successives pour éviter que des familles entières ne se retrouvent sans domicile fixe, mais il semble également qu’il y ait plus de déguerpissements que jamais. Ce qui est aussi une conséquence des pertes de revenu et d’emploi engendrées par la crise du Covid-19, notamment pour les personnes qui se retrouvent dans des relations de travail particulièrement précaires: travail intérimaire, travail à temps partiel limité à quelques heures par semaine, CDD non renouvelés, «freelances», voire faux indépendants. Sans oublier la hausse du chômage, qui, même si elle a pu être ralentie par le chômage partiel et les plans de maintien dans l’emploi, reste considérable par rapport à 2019.

Il n’est donc pas étonnant que les initiatives de soutien aux sans-abri tirent la sonnette d’alarme et fassent savoir qu’ils observent une hausse considérable de personnes sans domicile fixe dans leurs structures d’hébergement. Une situation qui est aggravée en même temps du fait que les personnes à la rue se voient désormais être criminalisées par le couvre-feu instauré entre 23 heures et 6 heures. Les personnes concernées se retrouvent donc dans l’obligation de se rendre dans les foyers pour sans-abri. Or, dans ces foyers, en raison des règles de distanciation qui sont à respecter, il y a encore moins de places disponibles qu’en temps normaux.

Cette situation fait apparaître en plein jour l’explosion des inégalités que l’OGBL met en exergue depuis des années. Celle-ci est le fruit d’une politique qui considère la hausse faramineuse des prix du logement comme une loi de la nature et qui n’a pas pris de mesures appropriés pour endiguer la spéculation qui est à l’origine de la crise du logement. Elle est aussi le résultat d’une tendance à la précarisation de l’emploi, qui s’est accentuée ces dernières années.

Et désormais, les infections flambent et l’hiver approche. Si le gouvernement veut éviter des situations où des personnes meurent de froid dans la rue, il y a lieu de prendre immédiatement des mesures d’urgence — en discutant par la suite avec les partenaires sociaux de mesures plus globales pour réduire durablement les inégalités et pour lutter sensiblement contre la hausse du taux de risque de pauvreté. L’OGBL propose à cet égard :

  • la suspension de déguerpissements jusqu’au printemps 2021, voire au-delà si la situation liée au Covid-19 ne s’améliore pas;
  • la prolongation du gel des hausses de loyer en 2021, accompagnée par des mesures de contrôle pour garantir que cette mesure soit effectivement respectée;
  • l’arrêt temporaire des interruptions d’approvisionnement en eau, gaz, électricité et télécommunications pour cause de retard de paiement;
  • la mise en place rapide de structures d’accueil supplémentaires.

Communiqué par l’OGBL
le 10 novembre 2020

Entrevue entre l’OGBL-FNCTTFEL et le ministre de l’Economie

La délégation de l’OGBL-FNCTTFEL composée de Nico Wennmacher, Georges Melchers, Laurent Bour et Stefano Araújo a tout d’abord remercié le ministre de l’Economie, Franz Fayot, pour sa disponibilité tout en excusant le président du Syndicat Chemins de Fer, Georges Merenz, absent pour raisons de santé. L’objectif de la rencontre était notamment de s’échanger au sujet des réductions de postes au sein de CFL cargo.

Les représentants du personnel ont accompagné cette réorganisation puisqu’elle a été réalisée sans licenciements et des solutions ont été trouvées pour les salariés en prêt de main d’œuvre qui sont retournés à leur employeur d’origine sans conséquences néfastes pour ces derniers. Néanmoins, l’OGBL-FNCTTFEL ne souhaite pas en rester là, d’où la nécessité de cette entrevue, afin de faire le point sur la situation et d’évaluer les moyens pour soutenir le secteur.

Dans un contexte marqué par de nombreuses incertitudes et des acteurs luxembourgeois ayant réduit leurs volumes de transports via le rail comme mesure de réduction de coûts au profit de solutions moins chères, l’OGBL-FNCTTFEL a tenu à mettre en évidence l’importance du secteur. Ceci non-seulement pour les emplois qui y sont directement liés, mais également pour ses aspects stratégiques, sociaux et environnementaux.

Pour l’OGBL-FNCTTFEL, le Luxembourg a besoin d’un transporteur de fret via rail pour acheminer et transporter les marchandises qui viennent de plus en plus loin. Cela permet également de soulager nos routes et d’améliorer notre balance des émissions en CO2. Un (1) wagon est l’équivalent de trois (3) camions et émet huit (8) fois moins de CO2. D’où l’intérêt de soutenir et d’inciter les entreprises à recourir au transport via le rail au lieu de privilégier le transport routier, surtout pour les longues distances. Dans ce contexte, l’OGBL-FNCTTFEL estime par exemple que le mode de transport des marchandises doit être pris en compte dans les différents mécanismes de compensation des coûts indirects du CO2.

L’OGBL-FNCTTFEL considère également qu’il n’est pas tolérable qu’une entreprise abandonne le transport par rail au profit du transport par camion et ce uniquement motivée par le moindre coût. Ceci est d’autant moins soutenable si ces moindres coûts sont obtenus aux dépens des chauffeurs routiers. Il a été rappelé que la directive transport devait être renforcée afin de lutter contre les abus et surtout contre le dumping social dont les chauffeurs sont les premières victimes.

Le ministre de l’Economie a écouté avec attention les points soulevés par la délégation de l’OGBL-FNCTTFEL. Franz Fayot respecte et comprend les différentes positions exposées et il a également indiqué qu’il en tiendra compte dans les différents dossiers concernant ces différents aspects.

 

 

Accord signé entre partenaires sociaux pour le télétravail

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Depuis le début de la crise COVID-19, le recours au télétravail occupe une place prépondérante sur le devant de la scène médiatique, alors qu’il permet aux entreprises de poursuivre leur activité dans le respect des consignes des autorités publiques et de la santé des salariés lorsque la nature du travail le permet.

D’exception, le télétravail est devenu la règle pour un grand nombre de travailleurs et a permis ainsi de sauver l’économie d’un effondrement plus marqué encore.

Dans ce contexte, il était urgent d’en moderniser le cadre légal qui restait inchangé – malgré la digitalisation sans cesse croissante au sein des entreprises – depuis la signature de la convention nationale relative au télétravail de 2006 reconduite à plusieurs reprises.

Les partenaires sociaux ont retenu, de concert avec le Ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Économie sociale et solidaire, d’en discuter au sein du Conseil économique et social (ci-après « CES »). Le CES a ainsi adopté le 11 septembre un avis commun en matière de télétravail, comprenant une nouvelle proposition de convention.

Dans la continuité des travaux du CES, le LCGB, l’OGBL et l’UEL ont signé ce 20 octobre un nouvel accord interprofessionnel relatif au télétravail. Si cette nouvelle convention maintient le caractère volontaire du télétravail dans le chef du salarié et de l’employeur, point fondamental tant pour les syndicats que pour le patronat, elle innove sur différents aspects.

La définition du télétravail est écourtée et le champ d’application est précisé grâce à des exclusions explicites. La convention réglera désormais tant le télétravail régulier – à l’instar de la convention actuelle – que le télétravail occasionnel et clarifie ces notions par la fixation d’un seuil pour contrer l’incertitude juridique actuelle à ce niveau.

La convention modernise par ailleurs les voies disponibles pour introduire le télétravail au sein des entreprises et précise le rôle des représentants du personnel dans ce contexte. Elle prévoit aussi les droits et obligations à charge des parties en matière de protection des données, d’équipement de travail, de santé et de sécurité, d’organisation du travail et de formation. Le principe de non-discrimination entre les télétravailleurs et les autres travailleurs a été mis en évidence par l’introduction d’une disposition spécifique sur l’égalité de traitement.

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Cette nouvelle convention signée s’inscrit dans la durée. Si elle a pu bénéficier des apprentissages du télétravail massivement effectué pendant la crise actuelle, elle n’a pour autant pas vocation à régler le télétravail mis en place par les entreprises pour répondre à cette situation exceptionnelle qui perturbe encore gravement leur fonctionnement. Les entreprises seront cependant bien avisées de clarifier par écrit avec les salariés concernés les modalités de ce régime temporaire de télétravail.

La nouvelle convention relative au télétravail devrait entrer prochainement en vigueur pour l’ensemble des entreprises au Luxembourg suite à sa déclaration d’obligation générale par voie de règlement grand-ducal, suivant la demande des partenaires sociaux adressée en ce sens au Ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Économie sociale et solidaire. Si la situation actuelle encore perturbée par la crise ne permet pas de prédire l’ampleur du télétravail encadré par cette nouvelle convention pour les années à venir, il est certain qu’il sera davantage plébiscité et utilisé par les salariés et les entreprises qui en ont fait l’expérience ces derniers mois.

>> Convention du 20 octobre 2020 relative au régime juridique du télétravail (PDF)

 

Les leçons des crises précédentes ont été retenues mais les annonces restent insuffisantes


L’OGBL a pris acte du discours sur l’état de la nation prononcé le 13 octobre 2020 par le Premier ministre Xavier Bettel et a commencé à analyser le projet de budget pour 2021 déposé le 14 octobre par le ministre des Finances, Pierre Gramegna. Si l’OGBL tient à saluer une série d’annonces positives faites par les deux membres du gouvernement, il tient également à souligner que celles-ci demeurent toutefois insuffisantes au regard de la gravité de la situation sociale et économique que traverse actuellement le pays et des multiples crises préexistantes qui n’ont fait que s’accentuer dans le cadre de la crise liée au COVID-19 (transformations du monde du travail, logement, pouvoir d’achat, inégalités, climat…).

Parmi les accents jugés positifs, l’OGBL relève notamment la volonté affichée du gouvernement de ne pas soumettre le pays à une nouvelle politique d’austérité avec toutes les conséquences désastreuses — aussi bien sociales, économiques que politiques — que cela entrainerait. Les leçons de la crise financière de 2008/2009 semblent avoir été retenues sur ce point. Le Premier ministre a même souligné l’importance d’un Etat-providence fort, en plaidant d’ailleurs pour son renforcement. L’OGBL ne peut que s’en réjouir. Le haut niveau d’investissements de l’Etat que le gouvernement souhaite maintenir est également jugé positif par l’OGBL, tout comme la possibilité laissée ouverte de continuer à faire des emprunts publics, s’ils s’avéraient nécessaire. L’Etat luxembourgeois dispose en effet toujours de marges de manœuvre en la matière, qu’il faut s’autoriser à exploiter si la situation l’exige.

L’OGBL salue également le fait, qu’à l’exception notable toutefois de l’introduction de la taxe carbone, le gouvernement n’ait pas annoncé d’augmentations fiscales (directes ou indirectes) supplémentaires, qui mineraient le pouvoir d’achat des tranches de la population à faible et moyen revenus.

Enfin, la décision de prolonger la possibilité pour les entreprises de recourir au chômage partiel au-delà du 31 décembre 2020 et de déterminer ses modalités d’accès au préalable, dans le cadre du dialogue social, constituent évidemment aussi une bonne nouvelle. L’OGBL insiste toutefois déjà dans ce contexte pour que l’accès au chômage partiel soit impérativement conditionné à un certain nombre de garanties (garanties d’emploi, maintien au minimum de l’accord garantissant que l’indemnité ne puisse être inférieur au salaire social minimum pour limiter les pertes de revenu…).

D’autres annonces faites par le Premier ministre et le ministre des Finances sont, quant à elles, largement insuffisantes pour l’OGBL Il en va ainsi des compensations sociales envisagées dans le cadre de l’introduction de la taxe carbone. Si l’OGBL salue le fait que le gouvernement ait retenu un principe de compensation échelonnée en fonction des revenus (crédits d’impôts dégressif), il considère néanmoins que le montant compensatoire maximum retenu par le gouvernement (96 euros) est bien trop faible pour réellement compenser la nouvelle taxe et déplore qu’à partir d’un revenu annuel imposable de 80 000 euros, les personnes concernées ne puissent déjà plus bénéficier d’aucune compensation (rappelons que le salaire moyen au Luxembourg se situe autour de 65 000 euros). Qu’en est-il par ailleurs des tout petits revenus qui sont aujourd’hui exonérées fiscalement? Ne bénéficieront-ils d’aucunes compensations? Et que fait le gouvernement de son principe dit du «pollueur-payeur» dans le cas des locataires, qui n’ont donc aucune influence sur le type d‘énergie utilisé dans leur logement, que ce soit pour se chauffer, se laver ou bien encore cuisiner. L’OGBL demande ici au gouvernement, soit d’exclure le mazout et le gaz naturel de la taxe carbone, soit d’introduire un dispositif de remboursement à l’attention des ménages en location. Quoi qu’il en soit, comme on le voit, cette nouvelle taxe carbone ne se présente pas du tout équilibrée d’un point de vue social.

L’OGBL juge par ailleurs inadmissible que le gouvernement présente l’augmentation de 10% de l’allocation de vie chère comme étant une compensation sociale en lien avec l’introduction de la taxe carbone. En effet, l‘allocation de vie chère n’a plus été adaptée depuis 2009 et sa revalorisation annoncée peut donc, au mieux, être considérée comme un ajustement modeste et toujours insuffisant qui aurait dû être réalisé depuis longtemps. L’OGBL avait salué le doublement du montant de l’allocation en question, même s’il ne s’agit que d’une mesure temporaire pour l’année 2020. Cette mesure était très importante en vue d’amortir la perte de pouvoir d’achat des ménages concernés pendant la pandémie. Au vu de l’évolution de cette dernière, l’OGBL estime que la mesure doit être désormais prolongée jusqu’en 2021, et que lorsque la pandémie aura été enrayée, une augmentation plus importante que les 10% annoncés par le gouvernement doive être envisagée. L’OGBL déplore également qu’il ne soit pas prévu que les différentes primes que le gouvernement envisage d’augmenter (mobilité électrique et efficacité énergétique), par le biais des nouvelles recettes générées par la taxe carbone, ne soient pas soumises à un principe de progressivité. En l’absence d’un tel principe, celles-ci ne profiteront qu’aux ménages les plus aisés.

L’OGBL constate ensuite avec stupéfaction que, si le gouvernement prévoit certes toujours d’abolir en tant que tel le régime injuste et tant décrié des stock-options, il annonce désormais l’introduction d’un autre régime fiscal préférentiel, sous forme cette fois-ci de «primes participatives», qui semble malgré tout très similaire. L’OGBL s’oppose à l’introduction d’un tel régime dont seuls les très hauts salaires bénéficieront, venant ainsi créer de nouvelles injustices fiscales.

Restent les annonces du gouvernement dans le cadre de la lutte contre la crise du logement. Tout d’abord, l’OGBL se félicite des déclarations faites aussi bien par le Premier ministre et le ministre des Finances, suivant lesquelles il existe bien une spéculation tangible dans le secteur foncier et immobilier au Luxembourg et qu’ils proposent par conséquent de premières approches pour freiner la demande spéculative, par le biais de nouvelles lois fiscales. L’OGBL analysera les détails et la portée de la réforme annoncée des Fonds d’investissements spécialisés (FIS) ainsi que d’autres activités de sociétés, en les examinant à l’aune du principe de justice fiscale. Pour le reste, l’OGBL déplore que le gouvernement n’envisage toujours pas de mettre davantage de logements sociaux sur le marché (les objectifs du gouvernement en la matière sont largement insuffisants), ni de contraindre les communes à promouvoir des logements à prix abordables (réforme annoncée du pacte logement), ni d’amender son récent projet de loi relatif au bail à loyer (celui-ci doit être revu de fond en comble), ni de réformer l’impôt foncier (en y introduisant de la progressivité, tout en exonérant les biens résidentiels propres), ni d’introduire une taxe nationale sur la rétention des terrains. Bref, les annonces du gouvernement en matière de logement demeurent globalement bien en deçà de ce qui serait nécessaire pour relever sérieusement le défi que constitue la crise du logement.

Pour conclure, l’OGBL déplore également toute une série de silences de la part du Premier ministre et du ministre des Finances sur des thèmes qui devraient pourtant faire partie des priorités du gouvernement. Ainsi, les nécessaires réformes qui s’imposent en matière de droit du travail (plan de maintien dans l’emploi, plan social, faillites, formation professionnelle continue, bilan social d’entreprise, législation relative aux conventions collectives de travail…) n’ont même pas été évoquées. La même chose vaut pour les prestations familiales dont l’OGBL revendique une revalorisation et une réindexation urgentes auxquelles le gouvernement s’était d’ailleurs déjà engagé en 2014.

Communiqué par l’OGBL
le 15 octobre 2020

>> Cinq priorités pour sortir de la crise
>> Dossier – La sortie sociale de la crise

Une rentrée syndicale un peu différente

Back_Nora_ok_ok_11_gris2Nous sommes en automne. Cet automne et sa tant attendue reprise qui doit avoir lieu maintenant. Et même si nous nous attendions avant l’été encore à ce que la rentrée soit cette année synonyme de reprise, force est de constater que la pandémie de Covid-19 n’a pas encore été écartée.

Nous ne sommes pas encore sortis de la crise, aussi bien d’un point de vue sanitaire, économique que social. Nous devons apprendre, tant bien que mal, à vivre avec le SARS-Covid-19 et à retrouver le chemin vers une certaine normalité.

Et ce chemin ne sera pas facile. Il ne sera pas non plus réalisable sans l’OGBL. Bien au contraire. Si nous voulons trouver un voie politique, économique et sociale pour notre pays, cela ne peut se faire qu’ensemble, dans le dialogue social entre les forces vives, le gouvernement, le patronat et le salariat. C’est pourquoi, l’OGBL appelle une nouvelle fois les deux autres acteurs à s’asseoir ensemble à une table, sous la forme qui a fait ses preuves par le passé, la «tripartite».

La réorganisation du monde du travail, à la suite de l’état d’urgence de ces derniers mois provoqué par le Covid-19, ne pourra se faire que d’une manière socialement juste. Pour éviter que de nouvelles inégalités ne voient le jour dans notre société, pour empêcher de profondes fractures sociales, pour trouver des solutions qui seront portées de toutes parts, pour redonner une véritable impulsion à l’économie et pour offrir un avenir aux salariés et à leurs familles.

L’OGBL discerne un chemin pour sortir de cette crise – NOTRE sortie de crise en commun. Cela signifie un emploi pour tous. Du pouvoir d’achat pour tous. Le droit au logement pour tous. La justice fiscale pour tous. Et une sécurité sociale forte pour tous.

Nous avons une vision et des revendications dans chacun de ces domaines. La question du logement est aujourd’hui toutefois sans aucun doute la plus urgente. Non seulement parce que deux projets de loi, qui n’amélioreront certainement pas la situation, ont été déposés au Parlement. Non seulement parce que la question du logement devient de plus en plus explosive au Luxembourg. Non seulement parce que les loyers et les prix du logement augmentent de manière exponentielle, même après la crise du Covid-19. Mais aussi parce que tout le monde a désormais pris conscience de cet état d’urgence. Les habitants du Luxembourg et des régions frontalières commencent à se défendre. La colère et la frustration dans la société civile, concernant ce sujet, sont plus fortes que jamais. Des personnes d’origines, d’obédiences politiques et de conditions sociales différentes se rassemblent, forment des associations, se solidarisent, protestent, se lèvent et manifestent!

Et l’OGBL fait partie de ce mouvement. Le 10 octobre, une première manifestation a eu lieu à Luxembourg-ville. Et cela va continuer.

Ce mouvement ne peut désormais plus être arrêté. La crise du logement met en colère. Parce que, contrairement à la crise du COVID-19 ou la crise financière de 2008, elle n’est pas arrivée par effraction de l’extérieur dans notre pays. Non, elle est entièrement et totalement faite-maison.

La responsabilité de cette crise incombe avant tout à la politique, aux gouvernements successifs qui les uns après les autres, n’ont rien entrepris pour résoudre ce problème. Ces derniers ont laissé le libre marché de la concurrence régner, comme si le sol sur lequel on construit était une marchandise qui peut se reproduire indéfiniment.

Ainsi, année après année, une spirale s’est développée, qui a creusé l’écart entre les prix du logement et l’évolution des revenus de la population. Rien n’a été entrepris contre la course à la rentabilité et à la spéculation. Au contraire, de scandaleux allègements fiscaux et même des exonérations fiscales n’ont pas cessés d’être introduits pour les super-riches.

C’en est fini de l’inaction. Il n’est plus acceptable que la majorité de la population s’endette à vie pour avoir un toit au-dessus de la tête, tandis que quelques-uns s’enrichissent continuellement par le biais de la spéculation immobilière.

Cette crise touche des dizaines de milliers de ménages. Elle prive de plus en plus de gens du droit fondamental de pouvoir se loger. Cette crise doit cesser immédiatement.

Ceci exige que le gouvernement prenne de profondes mesures anti-crises. C’est la voie à suivre pour sortir de la crise. C’est ce que l’OGBL attend du gouvernement.

Pour notre droit fondamental au logement, pour des logements abordables, pour une politique dynamique de construction de logement qui reste en mains publics. Pour notre pouvoir d’achat et pour la cohésion sociale au Luxembourg.

Nora Back, Présidente de l‘OGBL
Octobre 2020

Cinq priorités pour sortir de la crise

Le Comité national de l’OGBL était réuni le 29 septembre dernier à Walferdange. Il s’agissait de la première réunion du Comité national de l’OGBL après la trêve estivale. Si ce rendez-vous revêt déjà d’ordinaire un caractère particulier — il vient sonner tous les ans la rentrée syndicale — il avait cette année toutefois un enjeu d’une toute autre qualité en raison évidemment de la crise liée au Covid-19 et de ses répercussions aussi bien économique que sociale.

Le Comité national de l’OGBL y a tout d’abord fait le point sur la situation — une situation qualifiée de «très grave» par Nora Back, la présidente de l’OGBL. Les effets de la crise économique commencent en effet à se faire ressentir dans les différents secteurs. Il s’agit désormais d’empêcher qu’une grave crise sociale n’éclate avec toutes les conséquences que cela aurait pour l’existence des salariés et de leurs familles.

Avant l’été, l’OGBL avait déjà présenté une série de pistes en vue de sortir par le haut de cette crise. Lors de sa réunion du 29 septembre, le Comité national est venu préciser les priorités que se donne l’OGBL dans les prochains mois et il a notamment décidé de lancer une campagne dans ce contexte, intitulée: «Notre sortie de crise – Travail, pouvoir d’achat, logement, justice fiscale et sécurité sociale pour tout le monde!».

Un travail pour tout le monde!

L’une des priorités absolues de l’OGBL réside évidemment dans la sauvegarde des emplois. L’OGBL revendique dans ce contexte toute une série de réformes touchant au droit du travail, qui visent à mettre en place un dispositif que l’OGBL appelle une «sécurisation des parcours professionnels». Si la plupart des revendications de l’OGBL en la matière ne datent certes pas d’hier, leur urgence se fait aujourd’hui plus que jamais ressentir. Comme on le constate dans de nombreux secteurs, il y a actuellement une tendance lourde, côté patronal, à vouloir réduire massivement les effectifs. Les annonces de plans sociaux se multiplient.

L’OGBL tente, partout où il y est confronté, d’imposer aux directions des plans de maintien dans l’emploi (PME) en lieu et place des plans sociaux destructeurs qu’elles annoncent. Contrairement aux plans sociaux, les PME permettent souvent d’éviter qu’il n’y ait des licenciements (par le biais de mesures de reconversion professionnelle, de préretraite, de chômage partiel, etc.). Or, la loi relative aux PME s’avère aujourd’hui encore trop lacunaire. Pour l’OGBL, celle-ci doit être absolument renforcée et devenir notamment plus contraignante envers les entreprises.

L’OGBL revendique également l’introduction d’un dispositif préventif, à savoir l’introduction de bilans sociaux d’entreprises, qui permettraient d’analyser régulièrement la situation de chaque entreprise, son évolution, le marché dans lequel elle évolue, les salariés qu’elle emploie, etc., et ainsi de pouvoir réagir à temps avant qu’une entreprise ne se retrouve face à des difficultés insurmontables l’obligeant à licencier des salariés.

La loi relative aux plans sociaux doit évidemment aussi être réformée d’urgence. Il est aujourd’hui encore trop facile pour une entreprise de faire un plan social et ainsi de licencier massivement des salariés, sans que ces derniers ne soient pour autant réellement justifiés. La loi peut actuellement aussi encore être trop facilement contournée par les entreprises. Il leur suffit pour cela de «saucissonner» les licenciements de masse qu’elles envisagent de réaliser pour échapper à l’obligation de négocier un tel plan social. Dans certains secteurs, cette pratique patronale est même devenue une véritable stratégie.

La loi sur les faillites et le dispositif de formation professionnelle continue font également partie des réformes que l’OGBL revendiquent d’urgence. Ces derniers doivent également être révisés et renforcés.

Comme annoncé, toutes ces mesures s’inscrivent dans le cadre d’une vision globale que défend l’OGBL, visant à maintenir les emplois… à sécuriser chaque parcours professionnel.

Du pouvoir d’achat pour tout le monde!

Une autre grande priorité de l’OGBL en cette rentrée mouvementée vise à maintenir et renforcer le pouvoir d’achat des ménages, qui a déjà beaucoup souffert au cours des derniers mois. Il suffit ici de songer par exemple aux pertes engendrées par le chômage partiel auquel ont été contraints, ou le sont toujours, de nombreux salariés. Et le pouvoir d’achat des ménages risque encore de continuer à souffrir dans les prochains mois, si rien n’est entrepris rapidement. Par ailleurs, lors de la dernière réunion tripartite, en juillet, aussi bien les syndicats que le gouvernement et l’UEL se sont entendus sur la nécessité de relancer rapidement l’économie luxembourgeoise. Or, pour l’OGBL, il est évident que si l’on souhaite relancer l’économie et plus encore l’économie locale — donc le marché intérieur — soutenir le pouvoir d’achat des ménages devient un impératif.

Dans ce contexte, l’OGBL continue de revendiquer une augmentation structurelle du salaire social minimum (SSM). La revendication est loin d’être oubliée. Bien au contraire! Le niveau du SSM demeure bien trop bas au regard du coût de la vie au Luxembourg. Et il n’y a aujourd’hui plus de controverse en la matière: tout le monde reconnaît que le niveau actuel du SSM ne permet pas de vivre décemment au Luxembourg. Celui-ci doit être renforcé d’urgence.  L’OGBL revendique également toujours une revalorisation des prestations familiales. Pour rappel, le gouvernement s’était engagé en 2014 (!) envers les syndicats à les réindexer à l’augmentation du coût de la vie, alors que celles-ci n’ont cessé de perdre de la valeur depuis 2006, date de leur désindexation par le gouvernement de l’époque. L’exécutif n’a jusqu’à présent pas tenu sa parole envers les syndicats.

Certes, le programme de coalition acté en 2018 prévoit désormais une telle réindexation, mais seulement à la fin de la législature. Pour l’OGBL, ceci demeure largement insuffisant.

Les prestations familiales doivent non seulement être réindexées dès maintenant, mais cette mesure doit également être accompagnée d’une compensation rétroactive pour les pertes subies par les ménages pendant presque 15 ans.

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Un logement pour tout le monde!

Parmi les principaux facteurs qui pèsent sur le pouvoir d’achat des ménages au Luxembourg figure aussi incontestablement le logement, dont les prix explosent depuis des années, ne permettant presque plus à un simple mortel de pouvoir se loger sur le territoire. L’évolution des prix immobiliers est en effet totalement disproportionnée par rapport à l’évolution des revenus. Et même la crise actuelle ne semble pas impacter cette spirale infernale.

La lutte contre la crise du logement au Luxembourg demeure pour l’OGBL ainsi une autre priorité dans les mois à venir. Il en avait déjà fait l’une de ses priorités dès 2019 en décrétant l’état d’urgence en la matière et en faisant toute une série de propositions pour enrayer le phénomène (introduction d’un impôt foncier progressif, interdiction du recours aux Fonds d’investissement spécialisés (FIS) dans le secteur immobilier, introduction d’une taxe nationale sur la rétention de terrains, plafonnement des prix des terrains, plafonnement effectif des loyers, réforme de la subvention au loyer, renforcement des aides en faveur de l’efficacité énergétique, augmentation substantielle de l’offre en logements sociaux, investissements renforcés de la part du Fonds de compensation dans le logement locatif à prix modéré).

L’OGBL commence aussi, doucement mais sûrement, à s’agacer du manque de volonté politique affichée par le gouvernement, comme en témoignent les deux propositions de loi déposées au cours de l’été. Le premier, visant une réforme du pacte logement, ne résoudra ainsi en rien la situation (la part de terrains dédiée aux logements à prix abordables demeure ainsi bien trop modeste) et risque même de l’aggraver (les communes et l’Etat ne seront pas contraints de construire eux-mêmes mais pourront confier cette mission à des promoteurs privés).

La deuxième proposition de loi porte quant à elle sur le bail à loyer. Le gouvernement vient ici de louper une occasion en or pour réformer enfin le critère qui fixe, depuis 65 ans désormais, les plafonds en matière de loyer.

De la justice fiscale pour tout le monde!

Un autre grand dossier, sur lequel l’OGBL compte mettre encore davantage l’accent dans les mois à venir et qui jouera un rôle décisif en vue d’une sortie sociale de la crise, réside dans la fiscalité.

Alors que la grande réforme fiscale annoncée par le gouvernement est actuellement en préparation, l’OGBL a en cette matière tout un catalogue de revendications visant d’une part à alléger la charge fiscale qui pèse sur les petits et moyens revenus (révision du barème fiscal visant à le rendre plus progressif et introduction d’un mécanisme d’adaptation régulière à l’inflation) et d’autre part à rétablir davantage de justice entre l’imposition des revenus provenant du travail et ceux du capital (stock-options, dividendes, etc.).


La question de la fiscalité
jouera un rôle décisif
en vue d’une sortie sociale de la crise!


L’OGBL se prononce en outre pour l’introduction d’un impôt sur la fortune des personnes physiques comme il est actuellement discuté publiquement. Et afin de dissiper tout malentendu, l’OGBL propose de le qualifier d’impôt sur la richesse, pour préciser qu’il s’agit ici exclusivement de viser les grandes fortunes dans le pays.

L’OGBL s’oppose par ailleurs à toute augmentation ou introduction de nouveaux impôts à la consommation. La taxe carbone, déjà annoncé par le gouvernement devra quant à elle, pour être acceptée par l’OGBL, être obligatoirement accompagnée de compensations sociales pour les revenus moyens et inférieurs.

Une sécurité sociale pour tout le monde!

Enfin, cette crise a plus que jamais démontré l’importance de disposer d’un système de sécurité sociale public et solidaire tel que nous le connaissons aujourd’hui. Celui-ci a en effet permis au Luxembourg de mieux traverser la crise que la plupart des autres pays. Et l’OGBL pèsera de tout son poids pour que cette leçon ne soit pas oubliée lorsqu’il sera l’heure de faire les comptes de la crise et que le modèle ne manquera pas de faire l’objet de nouvelles attaques provenant du camp néolibéral.

L’OGBL revendique également déjà à ce que les dépenses engendrées par le congé pour raisons familiales extraordinaire soient intégralement remboursées à la CNS par l’Etat. En effet, si l’OGBL a évidemment soutenu cette mesure importante au cours de l’état de crise, il conteste toutefois que la charge financière qu’elle représente soit portée par la Caisse nationale de santé, alors que de toute évidence, la nécessité de cette mesure n’entretenait aucune relation avec des cas de maladie. Ni les enfants, ni les parents qui en ont bénéficié, n’étaient malades en effet.

Pour l’OGBL, qui en fait une autre priorité en cette rentrée, le modèle sur lequel repose la Sécurité sociale au Luxembourg devra être stabilisé et renforcé dans les prochains mois. L’OGBL s’opposera à toute velléité visant à le privatiser ou à y introduire des logiques marchandes ou bien encore à introduire un système de médecine à deux vitesses.


2020/09/29 – Conférence de presse – Comité national du 29 septembre 2020