D’importants pas en avant

André Roeltgen, Präsident des OGBL
André Roeltgen, Président de l‘OGBL

L’année célébrant l’anniversaire historique des syndicats libres au Luxembourg touche à sa fin. Les festivités nationales et locales qui ont eu lieu à l’occasion du centenaire de l’œuvre syndicale de l’OGBL et des organisations qui l’ont précédé, pour le progrès social au Luxembourg, étaient un rendez-vous très important avec notre propre histoire.

Nombreux sont ceux qui, en participant aux festivités ou en regardant le film-documentaire «Streik» d’Andy Bausch ou en jetant un œil à notre livre «100 Joer fräi Gewerkschaften 1916-2016», ont pris véritablement conscience, en se plongeant davantage dans leur propre histoire, dans l’histoire du salariat, de la signification extraordinaire que le passé a pour le présent et pour l’avenir de notre syndicat ainsi que pour son combat en faveur du progrès social et de la démocratie.

Les succès ainsi que les revers qu’a connus notre syndicat au cours de son histoire et de ses combats pour l’amélioration de la situation sociale de ceux qui travaillent, ont toujours constitués le moteur du développement de notre syndicat. Et ce sont toutes ces expériences qui sont à la base et qui accompagnent le processus actuel de modernisation de l’OGBL. La réforme des statuts, décidée le 2 juillet par le congrès extraordinaire, est en train d’être mise en pratique. Le 13 décembre, le Comité national a dessiné une nouvelle «cartographie» de l’organisation locale de l’OGBL. Dans les 24 prochains mois, les 59 sections locales existant actuellement vont fusionner en 23 nouvelles sections locales – parmi lesquelles, 5 dans les régions frontalières et 18 sur le territoire luxembourgeois. Et à partir du mois d’avril 2017, un nouveau service national assistera les sections dans l’organisation de leurs activités syndicales. Dans les années à venir, une large dynamique va se produire au niveau des activités politiques, culturelles et de loisirs des sections de l’OGBL. Des activités qui satisferont les intérêts et les besoins de toutes les couches et de toutes les générations que comptent nos membres.

Et juste avant la fin de l’année, quel est le bilan de notre travail syndical des 12 derniers mois? La campagne «Un paquet social pour le Luxembourg – Pour un meilleur travail et un meilleur revenu» initiée dès la fin 2015 par l’OGBL a pris de l’élan au cours de l’année et a apporté des résultats positifs.

La nouvelle loi PAN figure, encore en décembre, à l’ordre du jour du parlement 1. L’OGBL n’a pas seulement réussi à contrecarrer les plans de flexibilisation du temps de travail du patronat hostiles aux intérêts du salariat. L’opposition et les propositions de l’OGBL ont également mené à un projet de loi, qui prévoit de meilleures règles quant au cadre, à la protection, aux heures supplémentaires et au principe de codécision tout comme il prévoit de meilleures dispositions compensatoires sous forme de réduction du temps de travail.
Sur insistance de l’OGBL, a été introduit une indexation des aides financières pour étudiants, qui sera d’application à partir de 2018. Par ailleurs, un projet de loi prévoyant l’adaptation automatique des prestations sociales de l’État (allocations familiales, chèques services etc. …) à l’évolution générale des salaires figure à l’ordre du jour. La revalorisation du congé parental prévue dans notre accord du 28 novembre 2014 avec le gouvernement a été transposée. Sans oublier non plus, le projet de loi positif portant sur la continuation de paiement de salaire en cas de maladie ou bien encore les nouvelles prestations des assurances-maladies.

La revendication visant un allègement de la charge fiscale pesant sur les petits et moyens revenus constituait un point central de notre programme d’actions syndical visant à corriger les mesures de crise. La réforme fiscale, récemment adoptée, donne dans une large mesure, satisfaction à nos revendications. Mais nous ne renoncerons pas à une revendication, à savoir l’introduction d’un mécanisme automatique d’adaptation du barème fiscal à l’inflation. Et pour 2017, s’y ajoute une modification anti discriminante de la loi en relation avec l’imposition des non-résidents mariés.

Le gouvernement a opéré un changement d’orientation budgétaire très important. Le Luxembourg a pris ses distances avec la politique d’économies contreproductive et la politique d’austérité désastreuse de ces dernières années. Une politique d’investissements publics élevés, couplée à un renforcement de notre État social sont les maître-mots dans la lutte contre les développements de crise économique, social et politique en Europe.
Cela doit se poursuivre en 2017. Également en ce qui concerne l’assurance dépendance. Ainsi qu’en ce qui concerne le salaire social minimum. La décision visant à l’adapter de 1,4% à partir du 1er janvier 2017 à l’évolution générale des salaires est bonne, mais reste largement insuffisante. Il y a nécessité urgente d’agir pour une amélioration structurelle du salaire social minimum. Pour davantage de justice en matière de rémunération. Le salaire doit permettre à chacun au Luxembourg de mener une vie bonne.
Au nom de l’OGBL, je souhaite à tous nos membres de belles fêtes et une heureuse année 2017 pleine de succès.


1 Le parlement ne l’avait pas encore adoptée au moment où cet article a été écrit.

L’opposition et la pression de l’OGBL ont commencé à porter leurs fruits

20161213 ar , Dudelange, maison Syndicale avenue Grande Duchesse Charlotte, OGBL, comité national avec André Roeltgen ,Photo: Alain Rischard / EditpressLe Comité national de l’OGBL était réuni le 12 décembre 2016 à la Maison syndicale de Dudelange. A l’ordre du jour de cette dernière réunion de l’année figuraient entre autre une analyse de la situation économique et sociale, un bilan de l’année écoulée, une analyse de plusieurs dossiers politiques en cours et une analyse de la situation dans les entreprises

Le Comité national de l’OGBL a notamment tiré un bilan de son action menée au cours de l’année 2016. Si l’OGBL s’impatiente quant à certains dossiers qui tardent à évoluer politiquement, il tire, au regard des nombreux succès obtenus par ailleurs cette année, un bilan très positif de son action. Des résultats qui sont à mettre au compte de la campagne «Un paquet social pour le Luxembourg – Pour un meilleur travail et un meilleur revenu».

Parmi les succès, on peut citer le compromis positif trouvé dans le cadre de la réforme de la loi sur le temps de travail (loi PAN) où l’OGBL a finalement réussi à repousser les attaques du patronat, la réforme du congé parental dans le cadre de laquelle l’OGBL a obtenu une revalorisation substantielle de l’indemnité, le projet de loi déposé par le gouvernement relatif à la continuation de salaire en cas de maladie qui répond désormais aux revendications de l’OGBL, l’accord avec le gouvernement visant l’introduction d’un mécanisme automatique d’adaptation des allocations familiales à l’évolution du salaire médian, l’adaptation du salaire social minimum et du RMG au 1er janvier 2017 ou encore la réforme fiscale qui sous la pression de l’OGBL va venir alléger la charge fiscale pesant sur les petits et moyens salaires (l’OGBL maintient toutefois ses critiques quant à l’abaissement de l’imposition des entreprises, l’absence de mécanisme d’adaptation du barème fiscal à l’inflation et la discrimination entre résidents et non-résidents mariés que va établir la réforme si elle n’est pas amendée au cours de l’année à venir).

Les nouvelles prestations qu’offrira la CNS à partir de 2017 (notamment la prise en charge du deuxième détartrage chez le dentiste et de l’achat de lunettes même sans ordonnance, l’abaissement du délai de renouvellement pour le remboursement de lentilles et l’augmentation du forfait kilométrique dans le cadre de transports en ambulances) sont également à mettre au crédit de l’OGBL qui revendique des améliorations depuis des années au niveau de la CNS.

L’OGBL constate également que son opposition à la politique budgétaire du gouvernement a porté ses fruits. L’OGBL n’a cessé de dénoncer au cours des dernières années les politiques d’austérité et d’économies et ne peut donc que se féliciter du changement de cap opéré par le gouvernement qui a décidé de miser désormais sur un niveau élevé d’investissement public tout en mettant fin au démantèlement social et en initiant des premières mesures allant dans le sens du progrès social.

Le Comité national s’est en outre penché sur quelques dossiers politiques actuellement en discussion. Concernant le projet de plan hospitalier, l’OGBL ne peut s’accommoder de la réduction de lits prévue, tout comme du risque d’«insourcing» des laboratoires et du sort réservé au traitement ambulatoire. Quant à la réforme de l’assurance dépendance, les discussions se poursuivent avec le ministre de la Sécurité sociale. L’OGBL a tenu à rappeler dans ce contexte qu’il ne tolérera aucune détérioration de celle-ci.

Le Comité national a enfin fixé ses priorités pour 2017, parmi lesquelles figurent entre autres l’augmentation structurelle du salaire social minimum et une politique tarifaire offensive.

La Révolution digitale ne se fera pas sans l’OGBL

Le Comité national de l’OGBL s’est penché sur la digitalisation de la société et de l’économie qui est actuellement en cours. Il est un fait que le développement technologique impulsé par cette «révolution digitale» a et aura encore dans les années à venir encore davantage, un impact important à la fois sur la société prise dans son ensemble et sur les modes actuels de productions capitalistes.

Contrairement au théoricien Jeremy Rifkin (qui a élaboré à ce sujet une étude prospective pour le compte du gouvernement luxembourgeois), l’OGBL est loin d’être convaincu que la révolution technologique actuellement en cours ne vienne remettre en cause le modèle de production capitaliste, au profit d’une économie dite participative («sharing economy»). Les premières évolutions tendent d’ailleurs plutôt à donner tort aux prophéties du futurologue américain. En témoigne, les monopoles croissants d’entreprises multinationales comme Google ou Amazon., qui surfent précisément sur cette révolution technologique.

L’OGBL reconnaît que le développement de la technologie digitale renferme de nombreuses potentialités qui pourraient, le cas échéant, également s’avérer positives, mais l’OGBL est tout aussi conscient que les dangers sont nombreux quant à ce que les inégalités ne se creusent encore davantage.

Au regard de l’enjeu et de la responsabilité qui lui incombent, l’OGBL compte endosser un rôle prédominant pour faire en sorte que les améliorations sociétales, sociales et économiques potentielles que promet cette évolution technologique adviennent réellement.

L’OGBL a déjà annoncé au gouvernement qu’il ne compte pas limiter son rôle dans les discussions à venir aux seules questions liées directement au travail et à l’emploi, mais revendique son implication à tous les niveaux de la discussion. Dans ce contexte, l’OGBL n’acceptera pas que certaines discussions soient menées dans le cadre d’instances où il n’est pas représenté (par exemple : les Haut Comités). L’OGBL rappelle enfin qu’il existe des institutions prédestinées pour les discussions qui s’annoncent, à savoir les instances tripartites que sont le Comité permanent du travail et de l’emploi, le Conseil économique et social ou encore la Caisse nationale de santé.

L’OGBL exige une réforme du modèle de négociation dans la fonction publique

Le Comité national de l’OGBL a tenu à saluer le résultat des négociations portant sur le récent accord salarial dans la fonction publique, jugeant ce dernier équilibré et adapté. Toutefois, l’OGBL estime que le modèle de négociation dans la fonction publique ne répond plus aux exigences de la réalité et nécessite par conséquent d’être réformé.

L’OGBL fait en effet remarquer que les accords salariaux dans la fonction publique, négociés actuellement par la seule CGFP, ont une incidence directe qui dépasse largement la seule fonction publique. Ainsi l’ensemble des services publics sont impactés par ce type d’accord. Or, l’OGBL est au moins aussi représentatif que la CGFP si l’on considère l’ensemble de ces services publics (fonction publique; secteur communal; secteurs conventionnés de la santé, des soins et du social) et revendique par conséquent sa présence à l’avenir à la table des négociations.

L’OGBL fait remarquer dans ce contexte que le conflit qui a cours actuellement dans le secteur de la santé, des soins et du social porte encore sur la transposition du dernier accord salarial dans la fonction publique. Et déjà, un nouvel accord à transposer se présente… L’OGBL revendique une réforme d’urgence!

Sections: une nouvelle cartographie a été adoptée

Un pas de plus a été franchi dans le cadre de la transposition de la réforme statutaire de l’OGBL décidée en juillet dernier. Le Comité national a en effet adopté la nouvelle cartographie des sections locales de l’OGBL, qui va progressivement se mettre en place au cours des deux prochaines années et faire passer celles-ci de 59 unités actuellement, à 23 (18 sur le territoire national et 5 réparties entre l’Allemagne, la France et la Belgique), dans le cadre d’un vaste processus de fusions (la nouvelle cartographie des sections de l’OGBL sera présentée prochainement). Le Comité national a également abordé le futur service national qui sera mis en place l’année prochaine pour accompagner et soutenir les sections dans le cadre de leurs multiples activités (information, formation et discussion politique; besoins locaux; culture, arts et loisirs). L’OGBL s’attend, grâce à ces mesures, à ce que les sections locales connaissent une nouvelle dynamique.

Aides financières pour étudiants – Après l’arrêt Verruga: un œil qui rit, un œil qui pleure

Cour_de_Justice_europeenne_logoL’OGBL se réjouit que, dans l’affaire Verruga, soutenue par lui pour un de ses membres devant la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), il ait été décidé le 14 décembre 2016 qu’un délai de travail ininterrompu de 5 ans, exigé d’un travailleur frontalier pour que ses enfants puissent obtenir une aide financière pour études supérieures de l’État luxembourgeois, est beaucoup trop long.

Comme l’a indiqué le porte-parole de la CJUE, la disposition de la loi actuelle, prévoyant une période de travail tout aussi longue, mais sur une période de 7 ans, risquerait de subir le même sort, comme l’avait laissé entendre l’avocat général Wathelet dans ses conclusions du 2 juin 2016.

L’OGBL voudrait cependant rappeler son propre communiqué du 2 juin dans lequel il appuyait tout particulièrement les conclusions principales de M. Wathelet tendant à conforter expressément le droit inconditionnel de tous les travailleurs à bénéficier des mêmes avantages sociaux dans le pays dans lequel ils travaillent, pendant la durée de leur travail, comme le prévoit expressément le règlement sur la libre circulation des travailleurs.

Une jurisprudence comme celle dans l’affaire Giersch (arrêt de principe du 20 juin 2013 dans les affaires d’aides financières) ou maintenant dans l’affaire Verruga constitue en fait, malgré leurs effets positifs sur les travailleurs de longue date au Luxembourg, une violation de ce règlement, qui n’a jamais exigé un «lien d’intégration» avec la société du pays de travail. Donc l’arrêt Verruga constitue en même temps un inquiétant pas en arrière inspiré par la théorie fausse et discriminatoire (expressément citée!) d’un prétendu «tourisme des bourses d’études».

Pareillement, l’OGBL voudrait rappeler qu’il a dès le début soutenu que l’aide financière pour étudiants, qui remplace les allocations familiales pour étudiants, est de fait une prestation sociale qui devrait être basée sur le système élaboré de non-cumul existant en la matière et qui résoudrait beaucoup de problèmes aussi pour le gouvernement luxembourgeois en mettant sans doute fin aux recours incessants et aux questions préjudicielles devant la CJUE.

L’OGBL n’a pas abandonné l’espoir que les juridictions luxembourgeoises soumettent un jour cette question à la CJUE.

Communiqué par l’OGBL
le 14 décembre 2016

Le projet de loi laisse planer de grosses incertitudes pour les frontaliers

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L’OGBL appelle à un piquet de protestation:
Vendredi 9 décembre 2016 à 12h30
devant la Chambre des députés à Luxembourg-ville
(19, rue du Marché-aux-Herbes)

L’OGBL porte, globalement, une appréciation positive sur le projet de réforme fiscale présenté par le gouvernement luxembourgeois car celui-ci comporte de réels allègements de la charge fiscale pesant sur les salariés et les pensionnés et il contribue, de ce fait, à renforcer leur pouvoir d’achat. Mais ce projet de réforme qui doit entrer en vigueur en deux temps (2017 et 2018) introduit également pour les frontaliers une complexité et une imprévisibilité que le système fiscal n’avait pas encore connues jusqu’à présent. Nombre de points contenus dans ce projet demandent absolument à être clarifiés quant à leur application concrète. L’analyse du projet laisse en effet apparaître que certaines mesures vont provoquer une insécurité juridique importante, voire des dégradations financières dont les frontaliers seront les premières victimes. L’OGBL revendique le report de ces mesures jusqu’à ce qu’une analyse fine de leurs conséquences ait pu être conduite et des alternatives limitant les dommages fiscaux collatéraux ait pu être trouvées.

>> Six points à corriger selon l’OGBL (flyer en pdf)

>> Piquet de protestation (flyer en pdf)

Réforme fiscale 2017 : de grosses incertitudes laissées par le projet

L’OGBL a organisé le 28 novembre 2016 une conférence de presse commune avec le LCGB portant sur le projet de réforme fiscale qui laisse apparaître de grandes incertitudes.

photo_3Le projet de réforme qui doit entrer en vigueur en deux temps (2017 et 2018) introduit pour les contribuables salariés/pensionnés, qu’ils soient résidents ou non-résidents, une complexité et une imprévisibilité que le système fiscal n’avait pas encore connues jusqu’à présent.

Si nombre de points contenus dans le projet appellent une nécessaire clarification sur leur praticabilité et leur application concrète, le LCGB et l’OGB-L soulignent ici six problèmes qu’il conviendrait d’étudier et de discuter en profondeur avant que les mesures n’aient force de loi.

Corriger ces problèmes permettrait d’aller réellement vers l’objectif assigné au projet de tendre vers davantage d’égalité entre contribuables et de transparence du système fiscal.

  1. Choix a priori et sans visibilité de la classe d’impôt pour résidents et non-résidents
  2. Manque d’uniformité dans les classes d’impôt
  3. Des conditions d’accès à l’imposition collective resserrées et restrictives
  4. Des retraités également fortement touchés
  5. Des partenaires qui disposent de plus de flexibilité
  6. De possibles conséquences négatives sur le revenu disponible des contribuables résultant de l’application du CIM et du CIS

  • Choix a priori et sans visibilité de la classe d’impôt pour résidents et non-résidents

 

La nouveauté en termes d’organisation des classes d’impôt concerne les contribuables mariés. Ceux-ci devront tenter de choisir entre imposition collective ou imposition individuelle avant le 31 décembre de l’année qui précède.

La compréhension du système demandera encore davantage d’expertise qu’auparavant pour réaliser le choix le plus approprié à la situation personnelle des contribuables mariés.

Pour les non-résidents : classe 1, classe 2 (imposition collective) ou imposition individuelle ?

Pour les résidents : classe 2 ou imposition individuelle ?

Le choix difficile de la classe d’impôt repose sur les seuls contribuables mariés. En cas d’imposition individualisée, ce choix devra même être anticipé et sera irrévocable.

Ceci pose deux grands problèmes pour les concernés :

– premièrement, il faut bien comprendre les différents régimes entre lesquels on doit choisir et les conséquences fiscales de ce choix. Les ménages aisés et les mieux informés pourront plus facilement recourir à une expertise externe coûteuse ;

– deuxièmement, personne ne dispose, avant l’année en question, des informations sur les revenus annuels globaux en fin d’exercice. Par ailleurs des changements de la situation familiale et/ou professionnelle et financière peuvent se produire en cours d’année et changer complètement la donne.

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Idéalement, l’Administration des contributions directes devrait pouvoir donner des indications aux contribuables mariés sur les conséquences fiscales des différentes options qui s’offrent à eux.

Pour lever ces difficultés, il est proposé que pour l’ensemble des contribuables mariés le choix de sa classe d’impôt (c.à.d. de son option d’imposition) soit réalisé a posteriori, dans le cadre d’une déclaration d’impôt.


  • Manque d’uniformité dans les classes d’impôt

 

Le droit commun pour les contribuables mariés diverge en fonction de leur lieu de résidence : imposition en classe 2 pour les résidents (sauf demande contraire) et en classe 1 pour les non-résidents (sauf demande contraire).

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Il est proposé de ranger tous les contribuables mariés en classe 2, indifféremment de leur lieu de résidence : sur demande par le biais d’une déclaration, en fonction de sa situation propre, le contribuable non résident pourra passer en classe 1 classique ou en imposition individuelle nouvellement introduite par le projet, si cela lui est plus favorable.

Concrètement, ceci revient à inverser la logique qui prévaut pour les non-résidents et à les placer dans le mécanisme d’opt-out ouvert au résident marié par l’imposition individuelle.


  • Des conditions d’accès à l’imposition collective resserrées et restrictives

 

Les contribuables mariés non résidents obtiennent actuellement la classe 2 si 50% du revenu professionnel du ménage sont imposables au Luxembourg. En outre, si 90% des revenus personnels indigènes et étrangers d’un des membres du couple marié sont imposables au Luxembourg, ils peuvent être assimilés aux résidents, c’est-à-dire déclarer tous leurs revenus au Luxembourg et bénéficier de toutes les possibilités de déductions à l’instar des résidents (article 157ter).

Après la réforme, le seuil de 50% va tomber, et il faudra atteindre le seuil des 90% des revenus indigènes et étrangers imposables (d’un des membres du ménage) au Luxembourg pour avoir accès à la classe 2 et en même temps être assimilé complètement (et donc, pouvoir accéder à une imposition collective).

Cette condition de 90% risque d’exclure bon nombre de contribuables de la classe d’impôt 2 (notamment les retraités, cf. infra) qui seront alors imposés définitivement en classe 1 tout en étant mariés.

Les résidents, eux, ne doivent remplir aucune condition de seuil pour émarger en classe 2, alors que ce n’est que si la condition de seuil de 90% est remplie (art. 157ter) que les non-résidents mariés seront imposés collectivement en classe 2.

Les conditions d’octroi de la classe 2 sont donc manifestement plus restrictives pour ces derniers.

Le risque que nombre d’entre eux encourent, particulièrement en provenance de France et d’Allemagne (pour les résidents en Belgique, le seuil est moindre en raison de la convention bilatérale belgo-luxembourgeoise), est qu’ils ne pourront pas bénéficier de l’octroi de la classe 2 (y compris certains couples actuellement déjà imposés collectivement) à l’instar des résidents alors qu’il serait, le cas échéant, de leur intérêt fiscal de pouvoir y accéder.

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Il est proposé de supprimer toute condition de seuil (d’assimilation ou d’obtention d’une classe d’impôt) pour les contribuables non-résidents mariés.


  • Des retraités également fortement touchés

 

La question du seuil de revenus sera aussi particulièrement pénalisante pour les retraités non résidents dans la mesure où l’immense majorité d’entre eux a travaillé dans plusieurs pays et perçoit également une pension étrangère. Seule une imposition en classe 1 sera possible à l’avenir si moins de 90% de leurs revenus (= pension) provient du Luxembourg.

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Il est proposé de réévaluer les conditions de seuil et, à l’instar de la demande pour les actifs, de ranger les retraités mariés en classe 2, comme le sont les retraités résidents mariés.


  • Des partenaires qui disposent de plus de flexibilité

 

Les couples mariés en présence d’un enfant à charge ne bénéficieront pas de la classe 1A en cas d’imposition individuelle.

Il en sera de même pour un contribuable marié non résident qui ne parviendrait pas à atteindre le seuil des 90% (voir ci-dessus) et à accéder à l’imposition collective en classe 2.

Les couples sous le régime du partenariat légal pourront, quant à eux, bénéficier pour partie de la classe d’impôt 1A en présence d’un enfant à charge, voire être imposés collectivement s’ils en font le choix en fin d’année.

Il est proposé de réexaminer cette différence d’approche qui pénalise lourdement certains contribuables mariés.


  • De possibles conséquences négatives sur le revenu disponible des contribuables résultant de l’application du CIM et du CIS

 

Les modalités d’application du crédit d’impôt salarial (CIS), du crédit d’impôt pour pensionné (CIP) et du crédit d’impôt monoparental (CIM) restent pour le moins floues.

Les nouvelles dispositions font maintenant référence au revenu annuel brut des contribuables pour ouvrir le droit au CIS et au CIP (et au revenu imposable ajusté annuel des contribuables pour le CIM) ainsi que pour déterminer le montant de ces 3 crédits d’impôt.

Or, comme mentionné précédemment, les questions du niveau des revenus annuels (bruts/imposables ajustés), des revenus étrangers du ménage, de pensions alimentaires, de temps de travail, du nombre d’employeurs, … sont imprévisibles et des mécanismes resteront nécessaires pour faire face à ces inconnues en fin de l’exercice. Il est primordial d’assurer que le contribuable aura perçu mensuellement le montant garanti par la loi au niveau des différents crédits d’impôts.

Ces changements techniques portant sur les crédits d’impôt pourraient, le cas échéant, avoir un effet sur le revenu du ménage. Par exemple, les bénéficiaires du CIM pourront-ils toucher le minimum de 750 euros fixé par le projet au titre d’avance sur le montant global auquel ils pourraient avoir droit ?

Il est proposé de clarifier les modalités pratiques d’application qui entourent les nouvelles formules de ces deux crédits d’impôts.


Tous ces éléments vont provoquer une insécurité juridique importante, voire des dégradations financières dont les contribuables salariés seront les premières victimes. Qui dit insécurité juridique, dit potentielles clarifications auprès des tribunaux.

Au regard de ces différentes considérations, l’OGB-L et le LCGB demandent que les mesures dont l’entrée en vigueur est prévue pour 2018 soient retirées du projet et reportées sine die jusqu’à ce qu’une analyse fine de leurs conséquences et d’alternatives limitant les dommages fiscaux collatéraux ait pu être conduite.

Communiqué le 28 novembre 2016

La sécurité sociale n’est pas une société commerciale et doit rester co-gérée par les partenaires sociaux !

Lors de son assemblée plénière du 16 novembre 2016 sous la présidence de Jean-Claude Reding, la Chambre des salariés (CSL) a adopté son avis sur la gouvernance des institutions de sécurité sociale.

D’après le gouvernement, ce projet de loi, qui ne change rien aux prestations et au financement de la sécurité sociale, « entend poursuivre la modernisation de la gestion et l’amélioration de la gouvernance des institutions de sécurité sociale».

La Chambre des salariés ne peut pas accepter les dispositions du projet de loi.

Elle rejette fermement la démarche qui a présidé à la rédaction de ce projet, qui assimile la gestion de la sécurité sociale à celle d’une société commerciale. Par sa nature-même, la sécurité sociale doit avoir des finalités et des modes de fonctionnement propres, qui ne peuvent être calqués sur la gestion des entreprises du secteur marchand, dont le but principal est la réalisation de profits.

Le projet de loi contient des concepts qui sont fort en vogue, mais sont inacceptables dans le cadre de la sécurité sociale, qui est basée sur la cogestion par des représentants de l’État, des employeurs et des assurés, et qui tous participent à son financement.

Ce principe de la cogestion tripartite est, à l’heure actuelle, déjà affaibli en raison du fait que le président d’une institution de la sécurité sociale peut prendre des décisions sans passer par le comité directeur. Le projet de loi réduit encore davantage les droits des partenaires sociaux en supprimant le poste de vice-président, qui est occupé par un représentant des assurés ou des employeurs, notamment au sein de la Caisse nationale de santé. La Chambre des salariés voit dans cette disposition une défiance manifeste à l’égard des représentants des assurés et s’y oppose avec vigueur.

La terminologie du projet de loi est inadaptée et peut se révéler dévastatrice pour la sécurité sociale. En effet, le gouvernement a défini «les objectifs de la bonne gouvernance comme étant [entre autres] le renforcement de la compétitivité des acteurs économiques». Cet aspect est inadmissible pour la CSL. Ce critère de « compétitivité » purement économique n’a pas sa place au sein de la sécurité sociale.

Autre exemple : la volonté de mettre en place une gestion des risques est un symptôme révélateur d’une transposition de concepts qui sont en totale inadéquation avec le rôle joué par la sécurité sociale, dont la fonction principale est justement l’indemnisation des risques encourus par les assurés.

La sécurité sociale n’est pas une société commerciale où la rentabilité préside aux orientations stratégiques. La sécurité sociale a une tout autre fonction Elle fait partie de la politique sociale, remplit des missions de service public et doit rester co-gérée par les partenaires sociaux. Elle possède ce supplément d’âme qui fait qu’elle n’est pas une simple
assurance privée mais elle est la manifestation concrète de la solidarité entre tous les citoyens de ce pays, et même au-delà par la participation des travailleurs frontaliers.

En raison de l’introduction de principes de gestion d’une société commerciale dans la Sécurité sociale et la remise en cause de la cogestion par les partenaires sociaux, la CSL rejette le projet de loi en question.

L’intégralité de l’avis de la CSL se trouve sur www.csl.lu/avis-evacues-en-2016

Luxembourg, le 25.11.2016