La démission du recteur Rainer Klump, après deux années de mandat seulement, a été le point culminant des discussions des derniers mois autour du budget de l’Université du Luxembourg, qui ont mené à une véritable situation de crise interne.
Le SEW/OGBL, seul syndicat représenté au sein de la délégation du personnel de l’Université, estime cependant que le recteur démissionnaire n’a joué qu’une partie limitée dans les évolutions qui ont mené à la situation actuelle. Il est vrai qu’il aurait été souhaitable que le recteur soit plus présent dans son Université, il est néanmoins faux de lui enfiler le rôle du bouc émissaire.
Ce départ intervient d’ailleurs peu de temps après la publication des résultats de l’évaluation externe de l’Université, qui a montré les progrès considérables au niveau de la qualité de l’enseignement et de la recherche, progrès qui sont le produit du travail, de la motivation et de l’engagement des salariés de l’Université.
La situation actuelle est plutôt l’effet de l’approche utilitariste dominant l’orientation de l’enseignement et de la recherche depuis la création de l’Université en 2003 (et qui s’exprime notamment via le surpoids des milieux patronaux luxembourgeois au sein du Conseil de gouvernance/CG), d’autre part elle est le résultat des lacunes au niveau de la transparence et du dialogue social en interne.
Ces évolutions ont atteint leur paroxysme avec le refus du CG d’adopter la première ébauche de budget pour 2017 du rectorat, suivi de la décision de charger le cabinet de conseil McKinsey, cabinet qui a accompagné de nombreuses restructurations dans le secteur privé, pour identifier des pistes d’économies, puis d’engager un «chief transformation officer» sur base temporaire. Notons d’ailleurs qu’avant McKinsey, l’Université s’est déjà fait consulter, dans le cadre des négociations non conclues (et actuellement interrompues) d’une première Convention collective de travail, par Allen & Overy et Hay’s – le tout évidemment au frais du contribuable.
La presse fait état, sur base des chiffres de McKinsey, d’un prétendu «trou» de 26,9 millions d’euros. Pour faire face à ce «trou», McKinsey a élaboré des propositions d’épargnes à hauteur de de 19,7 millions d’euros. Les propositions donnent l’image d’une Université proche de la faillite, ainsi est-il entre autres prévu d’introduire une participation des salariés aux frais de… café, à hauteur de 40 ct./tasse, de limiter le nombre de fois que les bureaux sont nettoyés, ou encore de fermer l’Université pendant trois semaines par an (ce qui pose la question d’un congé collectif).
Mais le gros des économies serait fait sur la masse salariale: pas moins de 5,6 millions d’euros, principalement par un gel de recrutements, le non-renouvellement de CDD et la suspension du versement de toute prime non-contractuelle. C’est du jamais vu dans l’histoire de l’Université.
Or, est-ce que la situation financière de l’Université est véritablement dans un état si catastrophique, alors que le gouvernement continue d’afficher son niveau élevé d’investissements dans l’enseignement supérieur et la recherche et s’est engagé pour une augmentation de ce budget pour les années à venir?
L’exercice 2016 a en fait clôturé sur un … excédent de 2.750.760,24 euros. Le budget 2017 est en équilibre. L’Université dispose au 1er avril 2017 de réserves de plus de 17 millions d’euros. Où est le déficit?
En fin de compte, les 26,9 millions d’euros se réfèrent à la différence entre l’augmentation espérée de la dotation budgétaire de l’Etat par rapport à la dotation réelle, pas à une situation de déficit. Sans s’opposer à une politique des dépenses réaliste, le SEW/OGBL se demande si les économies du volume préconisé par McKinsey sont vraiment nécessaires. Il craint plutôt qu’une telle politique détériore les capacités de développement futur de l’Université.
Jusqu’ici les économies sur la masse salariale ne mettent pas en cause les avantages et primes définies dans l’accord d’établissement signé entre l’OGBL et l’Université, ni le système de rémunération en place, qui ne pourra être modifié selon l’accord d’établissement que par la conclusion d’une CCT.
L’OGBL se voit en tout cas confirmé dans sa décision de signer cet accord, même sans accord final sur une CCT, pour valider les résultats intermédiaires de la négociation et sauvegarder les acquis existants du personnel. Toute tentative de non-respect et de contournement de l’accord d’établissement serait en tout cas considérée comme un casus belli par l’OGBL.
De même, l’OGBL demande des garanties d’emploi claires pour le personnel en place. Des licenciements dans l’établissement public qu’est l’Université sont clairement pour nous une ligne rouge à ne pas franchir.
La situation des derniers mois a d’ailleurs confirmé le besoin urgent d’améliorer la communication et le dialogue en interne. La plupart du temps les salariés, y compris la délégation du personnel, ont pris connaissance des derniers développements par voie de la presse. Ceci a contribué au développement de rumeurs, telles les fausses informations publiées sur des dépenses de catering et de bouteilles de vin publiées par la presse le 3 mai (notons toutefois que les frais réels de catering équivalent plus ou moins à la prime pour le personnel administratif et technique dans le cadre du «Employee recognition program», qui est maintenant supprimée par le CG, ce qui montre les priorités…).
L’OGBL se voit en tout cas confirmé dans ses revendications centrales par rapport au nouveau projet de loi sur l’Université, à savoir l’inclusion de représentants du personnel avec voix délibérative dans le CG et le renforcement du Conseil universitaire comme représentation démocratique de l’ensemble de l’Université. Il demande avec insistance au ministre délégué Marc Hansen d’amender son projet de loi dans ce sens.
L’OGBL demande également l’implication de la délégation du personnel dans les discussions pour l’établissement du plan quadriennal 2017-2021.
Enfin, l’OGBL considère que, vu la situation actuelle, le remplacement du système actuel de rémunération par un système de rémunération basée principalement sur la performance individuelle, qui est préconisé par le rectorat, devrait être définitivement abandonné.
Communiqué par le syndicat Education et Sciences de l’OGBL le 8 mai 2017
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