Lors de l’entrevue du 25 avril dernier avec la ministre de l’Education nationale au sujet de la mise en œuvre de la réforme de la formation professionnelle, le SEW/OGBL avait soulevé que les résultats des élèves diffèrent fortement d’un lycée technique à l’autre et qu’ils sont catastrophiques dans nombre de classes et modules. Comme corollaire il avait été noté que face au nombre important d’échecs, les directions des lycées techniques rencontrent de graves problèmes d’organisation du rattrapage et que les mesures prises ne garantissent guère un encadrement digne de ce nom aux concernés. Elles tournent à la farce s’il est demandé aux titulaires de faire le rattrapage parallèlement à leur cours normal !
Pour réagir à cet état des lieux, la Ministre n’a trouvé mieux que d’adresser une lettre aux directeurs des lycées techniques épinglant les classes et modules à problèmes et leur demandant de la «renseigner si les résultats sont dus aux modalités spécifiques de l’enseignement » (en d’autres termes : aux enseignants) « ou si’il y a lieu de revoir le module» ( en d’autres termes: de l’alléger).
Elle néglige ainsi allègrement deux réalités: l’une qu’à la sortie du cycle inférieur, les élèves ne possèdent souvent pas les connaissances de base nécessaires, et l’autre que nombre d’enseignants – pour éviter des échecs massifs – interprètent de manière très large les critères d’évaluation. Ces deux réalités ne semblent pas intéresser Madame la Ministre : d’une part sa lettre met en cause les enseignants qui – respectant les critères d’évaluation – ne présentent pas les bons résultats tant espérés par les réformateurs; d’autre part, elle envisage de réduire encore les exigences des modules. Le mot d’ordre semble consister à présenter coûte que coûte une réforme à succès.
Continuant à refuser de parler d’un nivellement vers le bas – alors même que les futurs élèves obtenant leur diplôme de technicien «de base» n’auront plus droit à entamer des études supérieures – le MENFP et les chambres professionnelles axent leur communication sur la promotion des fameux modules préparatoires, nécessaires à l’accès à ces études. Ces modules, selon toute logique, devraient être spécifiques à chaque formation et préparer ainsi les meilleurs élèves à des études supérieures dans leur spécialité. Or, quelle n’a été notre surprise d’apprendre que le MENFP compte offrir – pour des raisons bassement financières – des modules préparatoires communs à toutes les formations – qui ne serviront ainsi à aucun des élèves qui les fréquentera. L’irrespect – et l’irresponsabilité – de nos décideurs envers les élèves concernés et leurs parents deviennent malheureusement de plus en plus flagrants au fil de l’avancement de la réforme.
Toutes les enquêtes – nationales et internationales – indiquent en effet unisono qu’à l’avenir, les postes de travail demanderont des qualifications de plus en plus élevées. Ne citons ici que la FEDIL – celle-là même qui soutient, comme la plupart des autres acteurs économiques, ardemment la réforme en question. Elle note dans son enquête portant sur les qualifications recherchées dans le domaine des technologies de l’information et de la communication qu’ « en termes qualitatifs, les entreprises ont exprimé des exigences de formation élevées pour la plupart des professions : le niveau BAC+2 est un minimum requis dans 93% des cas. Par contre les prévisions d’embauche pour le niveau DAP (2%), BAC technique (2%) et BAC technicien (3%) sont en nette régression ».
Qu’adviendra-t-il alors de tous ces élèves auxquels les formations de technicien «nouveau modèle» barrent l’accès au niveau BAC+2 ?
Le MENFP, dans son réformisme à l’aveuglette, est en train de lâcher toute une génération d’élèves en persistant dans une réforme qui se révèle, tous les jours un peu plus, être un échec total. Mais au lieu de freiner le mouvement, de réfléchir sur les errements passés, le MENFP continue, persiste et signe.
Quousque tandem abutere , MENFP, patientia nostra ?
Communiqué par le SEW/OGBL le 28 juin 2012
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