Entrevue du département secondaire du SEW-OGBL avec la ministre Delvaux-Stehres

Une délégation du SEW-OGBL, composée de Jules Barthel, Guy Foetz et Sonja Delli Zotti a rencontré en date du 9 janvier 2013 Mady Delvaux-Stehres, ministre de l’Education nationale et de la Formation professionnelle, entourée de ses collaborateurs Marc Barthelemy, Antonio De Carolis et Karin Meyer.

Lors de cette entrevue, le SEW a notamment mis en avant:

  • le nombre important d’échecs dans la nouvelle formation professionnelle, provoquant élimination et décrochage scolaire;
  • le chaos organisationnel des modules de rattrapage et des mesures de remédiation;
  • le manque important de contrats d’apprentissage, privant une multitude de jeunes de leur droit à une formation professionnelle adéquate;
  • la formation de technicien sacrifiée du fait que la voie vers l’enseignement supérieur est rendue pratiquement impossible;
  • la quasi-absence de passerelles de la formation de technicien vers le régime technique;
  • le manque de personnel enseignant, accentuant les déficits dans la mise en œuvre de la réforme;
  • la détérioration prévue des conditions de rémunération des enseignants lors des périodes de stage dans la formation du technicien.

A l’issue de l’entrevue, les  représentants du SEW et le MENFP se sont mis d’accord sur les points suivants:

  • les commissions nationales de formation (CNF) seront appelées à réfléchir sur les raisons qui ont conduit à des divergences importantes au niveau des résultats suivant les lycées et les classes lors des deux premières années de la formation réformée;
  • une analyse SWOT – forces et faiblesses, opportunités et menaces – de la formation professionnelle réformée sera réalisée avec la participation du SEW dans l’élaboration de cette étude;
  • en cas d’échec en classe de 10e, la possibilité d’une réorientation vers une même 10e est envisagée pour parer au décrochage scolaire et au chômage des jeunes;
  • au vu des problèmes importants constatés dans les formations administratives et commerciales du régime professionnel (DAP et DT), une réunion sera organisée entre le groupe curriculaire, le SEW et les responsables du MENFP et ceci en présence de la ministre;
  • la nouvelle réglementation concernant la rémunération des enseignants lors des périodes de stage sera analysée afin de trouver une issue plus favorable.

Nonobstant ces ouvertures signalées par la ministre, le SEW exige:

  • que la loi portant réforme de la Formation professionnelle soit revue de fond en comble;
  • que les modules préparatoires devant permettre aux futurs techniciens de poursuivre des études supérieures soient fixés en concertation avec les partenaires scolaires;
  • qu’un examen national sanctionnant le diplôme de formation professionnelle soit réintroduit;
  • que l’enseignement par modules et l’évaluation par compétences soient adaptés, voire abolis et qu’on revienne à un système d’enseignement et d’évaluation classique avec un complément au bulletin;
  • que toutes les classes de DAP et de CCP fassent au moins une première année à plein temps au lycée avant de passer à un régime concomitant, soit en classe de 11e, soit en classe de 12e;
  • que dans tous les lycées proposant les formations du régime professionnel, on mette en place selon des critères objectifs et en concertation avec les acteurs du terrain
    • des modules de rattrapage de qualité,
    • des mesures de remédiation uniformisées au niveau des pratiques et de la durée ;
  • que le diplôme de technicien habilite ses meilleurs élèves à poursuivre des études supérieures et qu’il faudra donc:
    • permettre aux techniciens d’acquérir un niveau linguistique adéquat,
    • réintroduire un cours de mathématique de base,
    • mettre en place des modules préparatoires spécifiques aux différentes formations et garantir que ces modules soient enseignés dans tous les lycées proposant les formations en question et ceci dans le cadre de la grille-horaire régulière!

Luxembourg, le 14 janvier 2013                                                                                       Communiqué par le SEW-OGBL

La négociation de la nouvelle convention collective aboutit à des résultats acceptables

Après six réunions de négociation, la nouvelle convention collective de travail pour les salaries de l’International School of Luxembourg (ISL) a enfin été signée le 20 décembre 2012.

Sous la responsabilité de l’OGBL, les syndicats OGBL et LCGB et le Conseil d’administration de l’ISL ont convenu du résultat suivant:

  1. Les 191 salariés de l’ISL-qui tombent sous le champs d’application de la convention collective de travail, bénéficieront:
    • d’une prime unique de 950€, payable lors de la signature,
    • au 1er septembre 2013, d’une hausse de 40€ de chaque échelon pour les enseignants, les infirmières, les assistants, le personnel administratif et technique (entre 0,53% et 1,80% d’augmentation),
    • au 1er septembre 2014, d’une hausse de 25€ de chaque échelon pour les enseignants, les infirmières, les assistants, le personnel administratif et technique (entre 0,33% et 1,11% d’augmentation),
    • d’une simplification de la procédure d’octroi des jours de congé pour affaires personnelles,
    • d’un jour de congé pour raisons familiales supplémentaire.
  2. Les 21 assistants bénéficieront d’une augmentation de leur durée de travail hebdomadaire de quatre heures (11,8%) et ceux qui ont une qualification comportant au moins deux ans d’études post-secondaires dans une matière relative à leur emploi se verront placés dans un nouveau barème (entre 4,05% et 8% d’augmentation).
  3. Les 20 membres du personnel administratif et technique recevront un mois supplémentaire de chèques-repas.
  4. Les 4 membres du personnel technique bénéficieront de congé collectif pendant les vacances scolaires d’hiver.
  5. Deux fois par année scolaire, 45 minutes de la réunion du personnel hebdomadaire seront mises à disposition de la délégation du personnel.
  6. La délégation du personnel participera à l’organisation de l’élection du représentant des enseignants dans le conseil d’administration et un délégué du personnel sera membre du bureau de vote et participera au dépouillement du scrutin.

La nouvelle convention a une durée de trois ans et sera effective du 1er septembre 2012 au 31 août 2015.

Les négociations ont eues lieu dans une bonne entente. La convention collective a été signée par les représentants du conseil d’administration et Danièle Nieles, secrétaire générale du SEW/OGBL, les délégués de l’OGBL Ralf Gehlen, Matthew Dwyer, Walt Lilyblad, ainsi que par Céline Conter, secrétaire syndicale du LCGB, et les délégués du LCGB Luc Kouba, JoAnne Cordner et Heng Schreiner.

Communiqué par le SEW/OGBL
le  21 décembre 2012

Le ministre de la Fonction publique s’obstine à refuser de négocier

A l’issue de la 3e réunion de la Commission de conciliation, les syndicats APESS et SEW/OGBL, représentant les 4 500 signataires du «Manifeste» s’opposant aux principes de la réforme du statut du fonctionnaire, regrettent de devoir constater l’échec de la procédure de conciliation.

Les deux syndicats avaient marqué leur soutien à l’initiative du conciliateur de demander à la délégation du gouvernement et aux représentants syndicaux de présenter leur argumentaire de fond sur les points du litige.

Après une présentation des propositions de la ministre Delvaux sur une mise en place des principes de la réforme projetée de la Fonction publique dans l’enseignement, les syndicats SEW et APESS ont exposé les motifs de leur refus de ces mêmes principes.

Les syndicats s’opposent à une gestion par objectifs. Ce principe, issu des entreprises privées et visant à stimuler la productivité et la concurrence, reste totalement étranger à la façon de penser et de travailler des enseignants de l’école publique.
Les «objectifs» du travail des enseignants sont définis par les plans d’études et il s’agit pour eux de mobiliser les intérêts et les moyens de leurs élèves pour les atteindre.

Le principe de l’évaluation des enseignants et des écoles selon une approche de mise en concurrence par rapport à des critères tout à fait aléatoires risque de remettre en question le travail de base visant à faire acquérir les connaissances et compétences de base à tous les élèves.

La hiérarchisation des carrières dans l’enseignement – par la création de 15 à 20 % de «postes à responsabilités particulières» – est une autre priorité totalement inadaptée à l’enseignement. Les carrières actuelles de l’instituteur et du professeur sont des carrières planes. Les enseignants exercent un travail similaire dans un groupe de personnes issues d’une même formation initiale. Ceci favorise l’esprit de coopération et permet d’obtenir une atmosphère favorable à un travail en équipe. Introduire une évaluation aboutissant à des «postes à responsabilités particulières» ne peut que miner ce travail en équipe.

En ce qui concerne les stages d’entrée à la fonction, leur seul objectif semble être celui de réduire le salaire des jeunes enseignants. Les deux syndicats refusent ces mesures qui visent les futurs jeunes collègues.

Lors des discussions, les représentants des syndicats ont dû se rendre compte que le ministre Biltgen refusait toujours strictement de négocier et persistait dans son attitude initiale de renvoyer les syndicats à entamer des négociations avec la ministre Delvaux pour la mise en place des mesures dans l’enseignement en suivant les principes contestés et rejetés.

Afin de respecter le mandat que la grande majorité des enseignants leur ont confié, cette proposition reste inacceptable pour l’APESS et le SEW et ne peut aboutir à des accords dans l’intérêt du bon fonctionnement et de la qualité de l’école, ceci d’autant plus que les idées avancées par la ministre Delvaux ne sont guère du genre à rassurer le corps enseignant par rapport à ses appréhensions légitimes d’un système d’évaluation par trop subjectif. En effet, il y était question, notamment, de références à la «valeur relationnelle», au «coaching», aux «pratiques réflexives» et à des «intervenants externes» dont la grandiloquence n’a jamais su masquer leur méconnaissance flagrante du terrain.

Une dernière proposition de la part des syndicats SEW et APESS d’entamer une renégociation de certains principes avec le ministre Biltgen après qu’une discussion avec la ministre Delvaux sur la mise en œuvre concrète desdits principes aurait prouvé l’incompatibilité de ceux-ci avec la réalité du système éducatif fut tout autant rejetée par le ministre Biltgen.

Il ne restait donc plus qu’à constater l’échec de la conciliation.

Les deux syndicats déplorent en même temps l’attitude du ministre Biltgen qui a cherché à éviter la constatation d’une non-conciliation par d’interminables arguties juridiques pour priver les enseignants de leur droit de grève en ressassant à l’envi la rengaine de la prétendue irrecevabilité, pourtant clairement démentie par plusieurs avis juridiques indépendants.

Après le procès-verbal de la non-conciliation, prévu pour le 6 novembre, le SEW et l’APESS porteront le litige devant le médiateur et poursuivront la procédure de grève. Ils resteront à tout moment ouverts à des négociations, mais ils n’en sont pas moins déterminés à continuer leur lutte. Ceci dans l’intérêt du bon fonctionnement des écoles et pour pouvoir être en mesure de garantir une éducation de qualité aux futures générations d’enfants et de jeunes.

Communiqué par le SEW/OGBL et l’APESS
le 26 octobre 2012

Lettre ouverte à Monsieur François Biltgen, ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative

Monsieur le Ministre,

Permettez-nous, au nom des syndicats SEW/OGBL et APESS et au nom des quelque 4 500 signataires de notre manifeste, de vous soumettre un argumentaire de fond pour vous expliquer pourquoi nous refusons l’application des principes de votre projet de réforme de la Fonction publique à l’enseignement.

Lors des réunions de la Commission de conciliation, vous avez bien admis la représentativité de nos deux syndicats pour le secteur de l’enseignement, mais en prétendant qu’il s’agirait d’un litige généralisé, vous persévérez à refuser tout dialogue et à essayer de priver ainsi les enseignants de leur droit de grève.

Or, le président de la Commission de conciliation, juriste et seul membre impartial de cette Commission, s’est rallié à notre position selon laquelle nous sommes dans la situation d’un litige collectif du secteur de l’enseignement. Ce point de vue est d’ailleurs confirmé par deux avis juridiques élaborés à la demande de nos deux syndicats, avis qui reconnaissent à leur tour les spécificités intrinsèques de l’enseignement et des enseignants en général au sein de la Fonction publique.

Votre proposition consistant à nous faire accepter préalablement les principes de votre réforme pour négocier ensuite avec Madame la Ministre de l’Education nationale les conditions de la mise en œuvre de ces mêmes principes, reste inacceptable pour nous. Ces principes risqueraient en effet de mettre en péril la sérénité nécessaire du travail des enseignants et la qualité de l’école publique. La gestion par objectifs, l’appréciation des enseignants et la hiérarchisation de leurs carrières respectives ne constitueraient pas un avantage pour la qualité de l’enseignement, mais au contraire seraient nuisibles et préjudiciables aux enfants.

D’ailleurs, compte tenu de la particularité des carrières de l’enseignement, la Commission des traitements propose, dans son rapport au Gouvernement, de ne pas hiérarchiser celles-ci. Le secteur de l’enseignement, à l’image de la magistrature avec ses spécificités propres, qui est exclue des principes de la réforme, demande des dérogations pour certains principes de l’accord entre le gouvernement et de la CGFP.

Permettez-nous, Monsieur le Ministre, de mettre en avant nos arguments !

Parmi les principes clés de votre réforme, qui ne sont pas compatibles avec la situation particulière de l’enseignement, figure la gestion par objectifs. Or, ce principe, issu de la gestion des entreprises privées et visant à stimuler la productivité et la concurrence, reste totalement étranger à la façon de penser et de travailler des enseignants de l’école publique.

Les « objectifs » du travail des enseignants sont définis par les plans d’études et il s’agit pour eux de mobiliser les intérêts et les moyens de leurs élèves pour les atteindre.

Des notions de productivité et de concurrence n’y ont – fort heureusement – rien à voir !

Vous placez ensuite «l’évaluation au cœur de la gestion par objectifs ».

Or, vous n’êtes pas sans savoir, Monsieur le Ministre, que des efforts considérables devraient être déployés par les écoles et par les enseignants pour mesurer le degré d’atteinte des objectifs.

Il faut dire que les enseignants ont d’autres priorités. Ce qui demande toute leur attention, c’est de se consacrer à leurs élèves, et il ne reste guère de temps pour traiter des paperasseries qui, de surcroît, n’apportent aucune plus-value aux élèves ou à la qualité de l’enseignement. Par ailleurs, l’enseignant, de par sa fonction, se trouve constamment confronté à l’évaluation au niveau de l’opinion publique. Son travail et son engagement sont de toute façon contrôlés par les parents et les élèves. Le travail des enseignants n’est souvent pas spectaculaire, mais demande un engagement patient sans rendement impressionnant, à première vue du moins :  contrairement à ce qui se passe au niveau de l’industrie privée, dont l’un des objectifs est de vendre les produits issus de la production, et ce par le biais de campagnes publicitaires bien orchestrées, l’École n’a pas pour mission de pratiquer le tape-à-l’œil, mais bel et bien de se consacrer patiemment et sereinement aux besoins spécifiques de chaque enfant.

Faudrait-il négliger cet engagement et concentrer les efforts plutôt sur des actions plus visibles ?

Il faut dire en effet que l’évaluation préconisée impliquerait une autopromotion constante des écoles et des enseignants. N’oublions pas que toute évaluation dans un système hiérarchisé suscite un esprit de concurrence par rapport aux collègues : les écoles et les enseignants seraient poussés vers la surenchère par des projets pédagogiques spectaculaires avec le risque accru de négliger le travail de base avec leurs élèves.

Ensuite : y aurait-t-il une chance de quantifier objectivement ? Il est bien évident qu’il est impossible de mesurer l’impact du travail des enseignants sur la réussite ou l’échec des élèves !  Il est vrai aussi que des élèves faibles demandent plus d’engagement pour leur faire obtenir des résultats comparables à ceux d’élèves plus doués. Quels efforts l’enseignant privilégiera-t-il dès lors qu’on le mesurera en termes de rendement ?

Dans cet ordre d’idées, il faudra que les décideurs politiques se défassent de l’illusion qu’une logique économique d’input-output soit applicable à l’enseignement, où le rendement n’est pas quantifiable comme il l’est peut-être dans un processus de production. Le travail patient avec des élèves plus faibles ne s’apparente en rien au schéma de la production industrielle, ni même à celui de l’artisanat : s’il est bien vrai qu’on peut rendre le menuisier chargé de fabriquer tel meuble entièrement responsable du choix et de la qualité du bois utilisé et de la qualité de l’exécution de son travail, tel ne pourra jamais être le cas lorsqu’on travaille sur le « vivant », et plus particulièrement dans l’éducation des jeunes, dont la collaboration active aura au moins autant d’impact sur le résultat final que le travail que lui aura consacré l’enseignant.

Finalement : qui serait désigné pour mesurer ?

Les directeurs des lycées et les inspecteurs du fondamental ont certainement autre chose à faire !

Probablement conscients du fait que l’évaluation individuelle annuelle des enseignants pose problème, vous-même et Madame la Ministre de l’Education nationale proposez l’évaluation collective par l’intermédiaire du plan de réussite scolaire (PRS) dans l’enseignement fondamental et du plan de développement scolaire (CDS) dans l’enseignement secondaire. Or, l’expérience vécue jusqu’ici dans l’enseignement fondamental réformé montre que le PRS gaspille surtout les énergies des enseignants. En détournant à son profit un temps et une énergie considérables des enseignants, la qualité de leur enseignement risque d’en souffrir. A l’image de l’Agence qualité qui s’occupe des PRS dans l’enseignement fondamental, l’évaluation a besoin d’un nombre toujours croissant d’experts, elle donne naissance à une bureaucratie parasitaire, qui détourne des ressources à son profit et qui se nourrit du travail d’autrui.

Nous pensons ainsi que le système de gestion et d’évaluation que vous préconisez est non seulement inapproprié et inefficient pour le secteur de l’enseignement, mais qu’au contraire, il risque de compromettre la qualité de l’école publique.

Monsieur le Ministre,

La hiérarchisation des carrières dans l’enseignement par la création de 15 à 20 % de « postes à responsabilités particulières – est une autre priorité totalement inadaptée à l’enseignement de votre réforme.

Les carrières actuelles de l’instituteur et du professeur sont des carrières planes, et pour cause. À la base, dans chaque ordre d’enseignement, les enseignants exercent un travail similaire dans un groupe de personnes issues d’une même formation initiale. Ceci favorise l’esprit de coopération et permet d’obtenir une atmosphère favorable à un travail en équipe et d’en éloigner tout esprit de flagornerie et de favoritisme. Introduire une évaluation aboutissant à des « postes à responsabilités particulières » ne peut que miner ce travail en équipe.

D’autre part, l’évaluation et l’introduction d’éléments de carrière aboutiraient immanquablement au classement des enseignants et surtout à la stigmatisation de ceux qui, pour s’être « attardés » avec les élèves les plus faibles, ne rentreraient pas dans le moule du rendement chiffrable à tout prix.

Ainsi serait instaurée une compétition permanente au sein du corps enseignant, et les enseignants transformés en concurrents et rivaux. Et ceci précisément à une époque où la ministre de l’Education nationale ne cesse, et à juste titre, de prôner le travail en équipes pédagogiques. Nous estimons en effet qu’il est impossible pour les enseignants de fournir un bon travail en équipe s’ils sont amenés à se considérer comme concurrents. C’est bien la raison pour laquelle le législateur a instauré à l’époque la carrière plane pour le secteur de l’Education.

Par ailleurs : quels pourraient être les postes à responsabilités particulières ? Quelles tâches en dehors du travail normal comporteraient-ils ?  En fonction de quels critères se ferait l’affectation à ces postes ? Voilà autant de questions auxquelles une négociation avec la ministre de l’Education nationale ne pourra fournir une réponse satisfaisante !

Les effets néfastes de ces principes d’évaluation et de classement étant largement connus, par le fait qu’ils ont été introduits dans d’autres pays, la question se pose de savoir pourquoi on n’évalue pas l’évaluation elle-même. Pourquoi ne la remet-on pas en question ?

Nous ne sommes pas dupes, Monsieur le Ministre ! Nous savons bien que l’objectif principal ne peut être l’amélioration de la qualité du travail, mais l’obtention du consentement des acteurs. En d’autres termes, iI s’agit d’amener les enseignants à se prêter à être évalués. Madame la Ministre de l’Education nationale est même d’accord pour faire toutes sortes de concessions sur les procédures d’évaluation ; le plus important, dans un premier temps, c’est que les enseignants consentent à l’évaluation. Ensuite, dès que l’évaluation sera inscrite dans la loi, on verra !

Comme Jacques-Alain Miller et Jean-Claude Milner l’écrivent dans leur ouvrage Voulez-vous être évalué ? Entretiens sur une machine d’imposture (Paris, Grasset, 2004, p. 35-37) : « Consentir à être évalué est beaucoup plus important que l’opération d’évaluation elle-même. Disons même : l’opération, c’est d’obtenir votre consentement à l’opération… […]

L’évaluation est la recherche méthodologique, inlassable, extrêmement maligne, du consentement de l’autre. »

Reste la question de la rémunération : nous constatons, Monsieur le Ministre, une dévalorisation des carrières « de base » de l’instituteur et du professeur !

Si la réforme, d’un point de vue financier, doit rester neutre, c’est-à-dire ne pas faire augmenter les dépenses de l’Etat, il est clair que les 25 points indiciaires dont profiteraient uniquement les bénéficiaires des « postes à responsabilités particulières » engendreraient une réduction salariale des carrières de base.

Des calculs effectués par nos soins révèlent effectivement une réduction salariale sur l’ensemble des deux carrières.

Monsieur le Ministre, nous vous avions, comme convenu, adressé une lettre demandant les tableaux des deux carrières en question. Cette requête est restée sans réponse à ce jour, malgré vos promesses !

En ce qui concerne les stages d’entrée à la fonction, leur seul objectif nous semble être celui de réduire le salaire des jeunes enseignants. Nous refusons ces mesures qui visent les futurs jeunes collègues.

Monsieur le Ministre, nous n’acceptons pas l’application des principes de votre réforme à l’enseignement et nous ne pouvons par conséquent entamer des pourparlers sur leur application avec la ministre de l’Education nationale et de la Formation professionnelle.

Nous vous demandons par conséquent de négocier les principes contestés par nos syndicats pour le secteur de l’enseignement.

Si vous continuez de refuser le dialogue, nous nous verrons dans le droit et dans l’obligation de constater une non-conciliation et de poursuivre la procédure de grève.

Nous vous adressons, Monsieur le Ministre, l’expression de notre considération distinguée.

pour le SEW/OGBL, pour l’APESS,
Patrick Arendt
Président
Daniel Reding
Président

Réforme de la formation professionnelle: les problèmes continuent de s’accumuler!

Lors de l’entrevue du 25 avril dernier avec la ministre de l’Education nationale au sujet de la mise en œuvre de la réforme de la formation professionnelle, le SEW/OGBL avait soulevé que les résultats des élèves diffèrent fortement d’un lycée technique à l’autre et qu’ils sont catastrophiques dans nombre de classes et modules. Comme corollaire il avait été noté que face au nombre important d’échecs, les directions des lycées techniques rencontrent de graves problèmes d’organisation du rattrapage et que les mesures prises ne garantissent guère un encadrement digne de ce nom aux concernés. Elles tournent à la farce s’il est demandé aux titulaires de faire le rattrapage parallèlement à leur cours normal !

Pour réagir à cet état des lieux, la Ministre n’a trouvé mieux que d’adresser une lettre aux directeurs des lycées techniques épinglant les classes et modules à problèmes et leur demandant de la «renseigner si les résultats sont dus aux modalités spécifiques de l’enseignement » (en d’autres termes : aux enseignants) « ou si’il y a lieu de revoir le module» ( en d’autres termes: de l’alléger).

Elle néglige ainsi allègrement deux réalités: l’une qu’à la sortie du cycle inférieur, les élèves ne possèdent souvent pas les connaissances de base nécessaires, et l’autre que nombre d’enseignants – pour éviter des échecs massifs – interprètent de manière très large les critères d’évaluation. Ces deux réalités ne semblent pas intéresser Madame la Ministre : d’une part sa lettre met en cause les enseignants qui – respectant les critères d’évaluation – ne présentent pas les bons résultats tant espérés par les réformateurs; d’autre part, elle envisage de réduire encore les exigences des modules. Le mot d’ordre  semble consister à présenter coûte que coûte une réforme à succès.

Continuant à refuser de parler d’un nivellement vers le bas – alors même que les futurs élèves obtenant leur diplôme de technicien «de base» n’auront plus droit à entamer des études supérieures –  le MENFP et les chambres professionnelles  axent leur communication sur la promotion des fameux modules préparatoires, nécessaires à l’accès à ces études. Ces modules, selon toute logique, devraient être spécifiques à chaque formation et préparer ainsi les meilleurs élèves à des études supérieures dans leur spécialité. Or, quelle n’a été notre surprise d’apprendre que le MENFP compte offrir – pour des raisons bassement financières – des modules préparatoires communs à toutes les formations – qui ne serviront ainsi à aucun des élèves qui les fréquentera. L’irrespect – et l’irresponsabilité – de nos décideurs envers les élèves concernés et leurs parents deviennent malheureusement de plus en plus flagrants au fil de l’avancement de la réforme.

Toutes les enquêtes – nationales et internationales –  indiquent en effet unisono qu’à l’avenir, les postes de travail demanderont des qualifications de plus en plus élevées. Ne citons ici que la FEDIL –  celle-là même qui soutient, comme la plupart des autres acteurs économiques, ardemment la réforme en question. Elle note dans son enquête portant sur les qualifications recherchées dans le domaine des technologies de l’information et de la communication qu’ « en termes qualitatifs, les entreprises ont exprimé des exigences de formation élevées pour la plupart des professions : le niveau BAC+2 est un minimum requis dans 93% des cas. Par contre les prévisions d’embauche pour le niveau DAP (2%), BAC technique (2%) et BAC technicien (3%) sont en nette régression ».

Qu’adviendra-t-il alors de tous ces élèves auxquels les formations de technicien «nouveau modèle» barrent l’accès au niveau BAC+2 ?

Le MENFP, dans son réformisme à l’aveuglette, est en train de lâcher toute une génération d’élèves en persistant dans une réforme qui se révèle, tous les jours un peu plus, être un échec total. Mais au lieu de freiner le mouvement, de réfléchir sur les errements passés, le MENFP continue, persiste et signe.

Quousque tandem abutere , MENFP, patientia nostra ?

Communiqué par le SEW/OGBL
le 28 juin 2012

Le ministre de la Fonction publique refuse toute négociation et porte atteinte au droit de grève de milliers d’enseignants opposés à son projet de réforme

Le 1er mars 2012, les syndicats APESS et SEW/OGBL avaient entamé une procédure de conciliation suite au refus du ministre de la Fonction publique de toucher aux quatre principes de sa réforme que sont :

– la gestion par objectifs ;
– l’appréciation du fonctionnaire ;
– la hiérarchisation de la carrière par majoration d’échelon ;
– un stage de 3 années rémunéré à 80 % respectivement 90%.

Lors de la deuxième séance de la Commission de conciliation, qui a eu lieu le mardi 19 juin, le ministre Biltgen a réitéré son refus de négocier les principes contestés par nos syndicats pour le secteur de l’enseignement. Il demande à nos syndicats d’ accepter ces principes pour entamer ensuite des pourparlers sur les modalités de mise en œuvre avec la ministre de l’Education. Mais nos syndicats s’opposent justement à ces principes et ils ne voient pas comment ils pourraient d’abord les accepter pour négocier ensuite leur application.

Par conséquent il n’y a eu aucune ouverture pour nos deux syndicats.

Dans des prises de position écrites demandées par le président de la Commission, le gouvernement et la CGFP estiment que ces principes, validés par un accord entre ces deux parties sont valables pour toute la Fonction publique et qu’ils ne peuvent être contestés pour le secteur de l’enseignement que dans le cadre d’un litige collectif généralisé que seule la CGFP en tant que syndicat représentatif pour l’ensemble de la Fonction publique serait en droit d’introduire.

Or le président de la Commission, seul membre impartial de l’assemblée, ne partage pas cet avis et soutient qu’il s’agit de litiges sectoriels que les syndicats SEW/OGBL et APESS sont en droit d’introduire.

Pourtant, étant donné que les délégués du gouvernement et de la CGFP ont une majorité au sein de la Commission, leur point de vue l’emporte au sein de celle-ci pour déclarer que le litige ne serait pas valablement engagé et qu’il serait « irrecevable ».

Les représentants des syndicats APESS et SEW/OGBL rejettent avec véhémence cette interprétation du gouvernement et de la CGFP. Ils estiment que la Commission de conciliation n’a pas à décider – avec notamment les voix de la partie patronale, constituée ici par le gouvernement – une « irrecevabilité » du litige. Au contraire, à défaut de négociation, elle peut seulement constater la conciliation ou la non-conciliation des parties. Toute autre interprétation serait une atteinte intolérable au droit de grève.
Mandatés par les 4.500 signataires du Manifeste de décembre 2011 et par les 6.000 enseignant-e-s sorti-e-s dans la rue pour la grande manifestation du 22 mars 2012, nos syndicats n’abandonneront pas leur résistance contre les projets de réforme.


Communiqué par le SEW/OGBL et l’APESS
le 21 juin 2012