Au moment où le Luxembourg prend pour les six mois à venir la présidence de l’Union européenne il y a lieu de rappeler que malgré la légère, mais fragile reprise économique, qui se fait d’ailleurs sentir de façon inégale dans les différents pays, l’économie européenne tourne toujours en-deçà de ses capacités productives et est en défaut d’investissements publics et privés. Empêtrée dans une gestion désastreuse de la mal-nommée crise de la dette publique (en fait une conséquence de la politique d’austérité mise en place en 2010-2011 couplée au maintien de la politique de privatisation, libéralisation et dérégulation, les tristement célèbres réformes structurelles), l’Union européenne ne répond pas à la crise environnementale qui menace l’avenir des générations futures. L’Union européenne reste enfoncée dans une profonde crise sociale avec un taux de chômage inacceptable, avec une dégradation des conditions de travail, avec un pouvoir d’achat stagnant, voire en régression pour beaucoup de salariés et retraités et avec un accroissement généralisé et toujours plus grand des inégalités et du risque de pauvreté.
L’absence d’une réponse politique crédible à ces crises multiples a fait naître une attitude de rejet du projet européen surtout parmi les couches populaires de nos sociétés et une crise politique, une crise qui touche aux fondements de la démocratie dans nos pays se profile à l’horizon.
Face à cette situation, l’OGBL, ensemble avec le mouvement syndical européen, estime qu’il faut changer de cap.
Il s’agit d’abandonner la politique d’austérité et de mettre en avant une politique économique et budgétaire qui relance l’investissement privé et public, surtout dans l’économie verte, dans la recherche et le développement et dans nos infrastructures. Pour sortir du marasme économique, pour réduire les inégalités croissantes, il est nécessaire d’augmenter les salaires, de réduire les inégalités fiscales, de soutenir les droits collectifs et les organisations syndicales et de renforcer la négociation collective. Le soutien à la création d’emplois de qualité, le rejet de la précarité et la lutte contre le dumping social devraient être les orientations de la politique de l’emploi en Europe. Il faut renouer avec une politique sociale en Europe qui vise à améliorer les conditions de travail pour permettre aux travailleurs de rester en bonne santé et d’éviter l’invalidité, une politique qui favorise une meilleure transition entre la vie active et la retraite, une transition plus flexible. Relancer une politique qui améliore la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, qui développe l’accès individuel et collectif à la formation continue, qui crée un véritable droit à la formation continue, permettrait d’augmenter le taux d’emploi. Combinée avec la création d’emplois et la lutte contre le chômage par une politique de maintien dans l’emploi et de protection contre le licenciement, une telle approche permettrait de renforcer nos systèmes de protection sociale qui sont essentiels pour le développement de nos sociétés.
Une telle orientation de la politique européenne qui tend à renouer avec le progrès social, à mettre en œuvre une harmonisation vers le haut tout en mettant en place une politique qui soutient l’investissement dans nos infrastructures, une politique industrielle qui soutient et protège l’activité industrielle tournée vers les technologies de pointe et l’innovation responsable du point de vue social et environnemental est essentielle pour que les citoyens retrouvent confiance dans le projet européen.
Dans cette optique, l’OGBL invite le Gouvernement luxembourgeois de soutenir lors de sa présidence européenne toutes les initiatives qui vont dans le sens de la politique décrite ci-devant. Le soutien du dialogue social structuré européen, le soutien de la négociation interprofessionnelle et sectorielle européenne, le respect des accord négociés, le maintien de la représentation syndicale nationale et européenne dans tous les comités, programmes et agences européennes qui concernent les domaines de compétence des syndicats est d’une importance capitale.
L’OGBL rappelle également les critiques du mouvement syndical européen envers le programme «REFIT» et le document «Mieux légiférer» de la Commission qui sous le couvert fallacieux de la lutte contre la bureaucratie risquent d’être utilisés pour détricoter les réglementations en matière de protection environnementale, de santé et de sécurité au travail et de mener à une politique à deux niveaux au détriment des travailleurs dans les petites et moyennes entreprises.
L’OGBL rappelle finalement ces critiques par rapport aux négociations des accords de libre échange et de protection de l’investissement privé en cours (CETA, TTIP, TISA). Sans surestimer le poids de la présidence luxembourgeoise et les moyens dont elle dispose, le Comité national de l’OGBL estime néanmoins qu’une approche qui se fonde sur les orientations décrites sommairement ci-dessus pourrait contribuer à aider à sortir l’Union européenne du marasme actuel.
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