Adaptations substantielles prévues pour certaines formations de la division du technicien dans la formation professionnelle initiale – les acteurs du terrain seront-ils mis devant le fait accompli ?

Depuis pas loin d’une année, le service de la formation professionnelle, ensemble avec les chambres professionnelles et les équipes curriculaires concernées, travaille sur une adaptation partielle de certaines formations de la division du technicien, en laissant dans l’ignorance totale des centaines d’enseignants qui, jour après jour, mettent toute leur énergie au service des élèves des formations concernées.

Cette adaptation partielle concerne les formations actuelles du technicien administratif et commercial, du technicien en e-commerce, du technicien en logistique et du technicien en vente.

Quels sont les piliers principaux de cette réforme partielle?

  • Création d’un tronc commun de deux années (classes de 4e et 3e) avec le retour — enfin — de modules de Mathématiques, avec un renforcement de l’apprentissage des langues et la mise en place d’un enseignement professionnel diversifié devant permettre aux élèves, à la fin du cycle moyen, de choisir en connaissance de cause la poursuite de leurs études lors de deux années de spécialisation.
  • Création de cinq formations spécialisées de deux années (classes de 2e et 1e) avec des spécialisations en Gestion, en Logistique, en E-Commerce, en Vente et en Secrétariat, le tout sous couvert d’une modernisation des formations en question, d’une meilleure préparation des élèves au monde du travail, voire d’une meilleure préparation aux éventuelles études supérieures dans la spécialisation choisie.

Si, de prime abord, ces réflexions semblent empreintes de justesse et reprennent, par ailleurs, certaines propositions de longue date du SEW/OGBL, un grand nombre de questions restent en suspens :

  • Alors que ces adaptations sont censées être appliquées à partir de la rentrée de septembre 2022, pourquoi les discussions sur ces adaptations substantielles se font-elles sans la moindre implication des enseignants du terrain et, par ailleurs, sans en avoir informé ni les directions des lycées impliqués, ni la plupart des commissions nationales de formation, ni les syndicats sectoriels?
  • L’évolution du monde du travail nécessite-elle vraiment ces adaptations scolaires? Dans l’affirmative, sur quelles statistiques se basent les chambres professionnelles et le MENJE? Le SEW/OGBL et l’APESS demandent que ces statistiques, si elles existent, soient rendues publiques!
  • Les réflexions actuelles et la nouvelle orientation que l’on compte donner à ces formations sont-elles le résultat de nouveaux profils professionnels pour les formations en question? Dans l’affirmative, le SEW/OGBL et l’APESS demandent que ces profils professionnels soient rendus publics ! Dans le cas contraire, le SEW/OGBL et l’APESS demandent à connaître les raisons précises qui justifient le choix d’entamer une telle réforme partielle.
  • Les raisons souvent évoquées en cas d’adaptations dans la formation professionnelle initiale sont 1) le problème des jeunes diplômés à trouver un emploi et 2) le taux d’échec élevé de ces mêmes jeunes dans leur parcours post-bac. Le SEW/OGBL et l’APESS demandent à ce que les statistiques à la base de ces affirmations, si elles existent, soient rendues publiques!
  • Quelles seront les répercussions de ces adaptations du cycle moyen et de la mise en place d’un tronc commun sur les programmes en classes de 2e et 1e du technicien de la division administrative et commerciale et notamment sur l’enseignement de modules pratiques tels «ENAP – Mettre en pratique les acquis dans différents services d’une entreprise d’entrainement». Ces modules sont basés sur un enseignement pratique qui présuppose l’acquisition, en classes de 4e et de 3e, de toute une série de savoirs et de compétences. Toutefois, dans une version «provisoire» de la grille horaire du tronc commun, que le SEW/OGBL a pu se procurer, les modules de «comptabilité» passent de 20 heures en classes de 4e/3e à 9 heures, les modules sur l’approvisionnement et la vente passant de 18 heures à 4 heures obligatoires et 4 heures optionnelles. De plus, les modules «Bases juridiques» (2 heures) et «Mise en pratique des acquis de l’approvisionnement et de la vente» (5 heures) passent complètement à la trappe. Les adaptations en question impliqueront-elles donc l’abandon pur et simple de cette catégorie de modules, pourtant essentiels au développement «entrepreneurial» des élèves. De même, qu’en sera-t-il d’un module tel «GEPRO – Initier et mettre en œuvre la planification de projets», module pratique qui nécessite une certaine maturité des élèves et qui, de ce fait, est enseigné prioritairement soit en classe de 2e, soit en classe de 1e. Dans le cas d’une future formation spécialisée limitée à deux années d’études, il est à craindre que ces modules (GEPRO et ENAP) soient parmi les premiers à être sacrifiés au profit d’une nième branche théorique «soi-disant» indispensable.
  • Qu’en est-il de la formation du technicien en Logistique qui, actuellement, est de plein temps en classe de 4e et concomitante en classes de 3e, 2e et 1e. Avec les adaptations prévues, les élèves seront ainsi privés d’une année complète d’apprentissage sur le terrain, année d’apprentissage remplacée par un seul module théorique de 4 unités au deuxième semestre de la classe de 4e et de deux modules de 2 unités, optionnelles, en classe de 3e. Par ailleurs se posera la question des titulaires responsables des modules de Logistique. Actuellement, cette formation est offerte dans deux lycées du pays et ces lycées recourent à des experts externes pour enseigner les modules en question. Qu’en sera-t-il avec l’instauration d’un tronc commun et la tenue de modules de Logistique, non plus dans deux lycées, mais dans une quinzaine d’établissements à travers le pays?

Le SEW/OGBL et l’APESS soutiennent la proposition de réintégrer les modules de Mathématiques dans les classes du cycle moyen. Le SEW/OGBL et l’APESS soutiennent également une politique de renforcement des compétences linguistiques des élèves dans la formation du technicien.

Le SEW/OGBL et l’APESS s’opposent toutefois à une spécialisation à outrance qui risque de ne pas être bénéfique aux élèves. Pourquoi, notamment, scinder une formation commerciale et administrative à vision généraliste en trois formations distinctes de «Gestion», de «E-Commerce» et de «Secrétariat» ? Les chances des jeunes de trouver leur place sur le marché du travail ne risquent-elles pas d’être réduites plutôt que renforcées en spécialisant à tort et à travers? Ne serait-il pas plus logique et plus utile d’enseigner à tous les élèves les notions importantes en gestion, en e-commerce et en secrétariat, plutôt que de les orienter vers des formations spécialisées qui se concentrent sur l’apprentissage d’un seul des domaines en question?

Le SEW/OGBL et l’APESS ne s’opposent pas non plus à l’idée d’un tronc commun. Tout au contraire. Le SEW/OGBL a, de longue date, proposé au MENJE d’allonger le cycle inférieur de l’ESG d’une année, avec une classe de 4e qui, outre les branches classiques de l’enseignement général, proposerait toute une série de cours d’initiations, théoriques et pratiques, permettant aux élèves de choisir leur voie d’orientation en connaissance de cause et non par défaut. Un cycle de spécialisation de trois années, aussi bien dans l’ESG que dans la formation professionnelle initiale, suivrait ce tronc commun de quatre années.

De plus, une telle constellation aurait comme avantage supplémentaire de proposer les mêmes cycles de formation dans l’ESG et dans l’ESC (cycle inférieur de 7e en 4e et cycle supérieur de 3e en 1e), permettant ainsi de faciliter le passage entre l’ESG et l’ESC en y instaurant enfin des passerelles dignes de ce nom.

Le SEW/OGBL et l’APESS sont ouverts à une véritable discussion avec tous les partenaires concernés sur toutes adaptations et réformes qui font sens. Cependant, le SEW/OGBL et l’APESS s’opposent à toute forme de chipotage dans les horaires et programmes actuels, dans le déni des enseignants et élèves directement concernés et dans une précipitation non fondée.

Communiqué du SEW/OGBL et de l’APESS
Luxembourg, le 7 juin 2021