Il ne se passe guère une semaine sans qu’une des entreprises établies à l’aéroport Findel ne se trouve à la Une de la presse. Cela ne signifie pas du tout que les nouvelles sont positives. Avec beaucoup de peine, une nouvelle convention collective a finalement pu être signée pour le personnel Luxair fin décembre 2014. Dès le début des négociations, en septembre 2013, la direction a joué sur le temps. Elle présentait aux syndicats un cahier de revendications totalement inacceptable.
Attaque frontale contre les acquis sociaux
Par l’introduction d’un système de performance et d’évaluation, l’abolition du 13e mois, la réduction des suppléments pour heures supplémentaires, pour le travail de nuit, des jours fériés et de dimanche, l’abolition des primes, l’augmentation du temps de travail, la réduction des salaires de début de carrière, l’intention de la direction était claire: travailler plus pour moins d’argent. Les syndicats étaient obligés de saisir l’Office National de Conciliation et de mener, en même temps, une campagne de mobilisation pour augmenter la pression sur le management. Alors que les conditions sociales restent pratiquement inchangées pour les salariés actuellement en place, les nouveaux embauchés doivent maintenant attendre trois ans pour rejoindre le niveau du salaire à l’embauche. Bien que l’automatisme de grille de salaire ait pu être sauvé, ces négociations étaient marquées par le démantèlement total de la convention collective.
Qatar bis?
Chez Cargolux, la peur de délocalisation, d’outsourcing, de dumping social se fait de plus en plus sentir. Pour freiner le démantèlement de la convention collective exigé par la direction générale, les syndicats ont saisi l’ONC du litige. Le management de Cargolux entend transférer trois avions vers sa filiale Cargolux-Italia, établie à Milan. L’idée de base de cette opération est très simple: elle consiste à embaucher, en Italie, des pilotes à un salaire moins élevé que celui prévu par la convention collective de Cargolux-Luxembourg et d’organiser plusieurs routes, ensuite, avec des pilotes sous contrat italien et des avions enregistrés en Italie. Alternativement, la direction propose une réduction radicale et massive des salaires pour les nouveaux embauchés. Le personnel au sol n’est pas épargné par cette politique antisociale. Le tout se place dans un vaste programme d’économies. Parallèlement, la direction est en train de planifier la création d’une nouvelle compagnie aérienne – Cargolux-China – établie à Zhengzhou, dans la province du Hénan. Il s’agit d’une Joint Venture tenue majoritairement par des actionnaires chinois. Cargolux entend investir 55 millions de dollars pour obtenir 25% des actions dans la nouvelle société. Or, Cargolux y sera complètement minoritaire et ne disposera même pas d’une minorité de blocage, nécessaire pour influencer la stratégie commerciale de la nouvelle société. En surplus, Cargolux s’est engagé à construire un nouveau centre de maintenance en Chine. Le risque de perte du savoir-faire et de délocalisation est réel, sans parler du risque financier pour Cargolux, voire pour le contribuable luxembourgeois. Rappelons, dans ce contexte, la fausse route Qatarie qui a presque saigné notre compagnie de fret aérien. Par cette nouvelle aventure, le site est de nouveau remis en cause.
Grogne du personnel Lux-Airport
La tempête menace également chez Lux-Airport, l’exploitant de l’aéroport, depuis que la direction veut flexibiliser davantage le temps de travail. Le volume de travail augmente constamment, alors que l’effectif reste inchangé. Ce manque d’effectifs est à l’origine d’une grogne auprès du personnel. Les négociations pour le renouvellement de la convention collective sont bloquées. Une fois de plus, les syndicats ont été obligés de saisir l’ONC. La direction de la société anonyme ALSA-Agence Luxembourgeoise pour la Sécurité Aérienne, n’a même pas jugé utile de répondre à la demande de l’OGBL pour entrer en négociations pour mettre en place une première convention collective de travail. Compte tenu de ce refus de négociation, l’OGBL a saisi l’ONC.
Et le rôle de l’État?
La question du rôle que joue le gouvernement luxembourgeois dans tous ces conflits est pertinente, dans la mesure où l’État luxembourgeois est directement ou indirectement actionnaire de 70% auprès de Luxair et de 65% auprès de Cargolux. Les sociétés anonymes Lux-Airport et ALSA appartiennent même à 100% à l’État luxembourgeois. Les décisions sont prises par les conseils d’administration dans lesquels siègent, par la force des choses, de nombreux représentants gouvernementaux. Elles sont donc cautionnées par le gouvernement luxembourgeois. L’État, ne devrait-il pas donner le bon exemple? Faut-il s’étonner que, par cette approche, l’appétit de nombreux employeurs du secteur privé ait été éveillé?
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