Dès l’annonce de la formation de la nouvelle coalition gouvernementale composée du CSV et du DP, l’OGBL avait prévenu que des temps difficiles s’annonçaient, compte tenu des programmes électoraux de ces deux partis. L’accord de coalition finalement conclu entre le parti conservateur et le parti libéral n’est venu que confirmer les craintes exprimées par l’OGBL. Si le programme gouvernemental comprend certes quelques éléments positifs, il demeure toutefois vague sur de nombreux sujets et puis il comprend surtout des attaques en règle dans les domaines qui touchent au plus près les intérêts des salariés, des pensionnés et de leurs familles.
Index Si le nouveau gouvernement affirme certes que «le système d’indexation sera maintenu sous sa forme actuelle », il le remet cependant en question dès la phrase suivante, en annonçant la convocation d’une tripartite dès lors que plus d’une tranche indiciaire serait due en l’espace d’un an. Et le gouvernement ne compte certainement pas réunir de tripartite pour proposer des améliorations, comme le serait par exemple le versement d’une tranche anticipée. Non, ce qui s’annonce, ce sont bel et bien de nouvelles tentatives de manipulations. L’OGBL se rendra à ces tripartites, mais avec un message clair et net: Pas touche à l’index!
Pensions Alors que le niveau des réserves du régime de pension s’élève à 23,5 milliards d’euros, et alors que les assurés ont déjà essuyé de lourdes pertes en raison de la réforme de 2012, le programme de gouvernement affirme néanmoins que le taux de cotisation actuel sera «insuffisant pour payer des pensions annuelles à partir de 2027 ». Alors que les programmes électoraux étaient restés plutôt silencieux à ce sujet, il est désormais clair que le gouvernement prépare d’ores et déjà de nouvelles détériorations, même s’il dit souhaiter trouver un «consensus » en la matière avec la «société civile ». Ce qui est certain, c’est que l’OGBL ne fera pas partie d’un «consensus » qui vise à détériorer le régime des pensions, que ce soit pour les pensionnés actuels ou futurs. Au contraire, il faut des améliorations.
Temps de travail Sous couvert de vouloir promouvoir une meilleure «work-life-balance », le gouvernement annonce des réformes fondamentales, qui risquent pourtant de produire exactement l’inverse: une flexibilisation à outrance, avec des salariés qui devront se tenir disponibles pour travailler à tout moment suivant le bon vouloir de l’employeur. Ainsi, il est annoncé que les limitations par rapport au travail du dimanche seront levées et que même le repos hebdomadaire sera revu. Plus grave encore, l’accord de coalition s’attaque directement aux droits de négociation des syndicats, en prévoyant d’office une annualisation du temps de travail. De telles formes de travail, aussi flexibles, sont possibles aujourd’hui mais uniquement dans le cadre de convention collective de travail (donc avec des contreparties). Et elles doivent le rester. L’OGBL s’oppose à ce que les conventions collectives soient remplacées par des accords d’entreprise sans les syndicats. Il faut une réduction du temps de travail et non des salariés disponibles 24 h sur 24.
Fiscalité Un des rares points positifs de l’accord de coalition réside dans l’ajustement des barèmes de l’impôt au 1er janvier 2024 qui s’appliquera désormais à 4 tranches indiciaires au lieu des 2,5 tranches prévues initialement. Mais, malgré les belles promesses électorales, aucun automatisme n’est prévu à l’avenir. Et le programme de gouvernement ne prévoit rien par ailleurs pour introduire plus de justice fiscale. Bien au contraire. Il s’oppose explicitement à une imposition plus forte des hauts revenus, des très grandes fortunes et des successions. Il annonce une baisse généralisée de l’imposition des bénéfices des entreprises, alors que le gouvernement précédent l’avait déjà baissée à deux reprises. En comparaison, les annonces portant sur d’éventuels allégements fiscaux pour les petits et moyens revenus, ainsi que pour la classe 1a, restent très vagues. C’est un programme fiscal qui ne fera que creuser les inégalités sociales. L’OGBL s’y opposera de toutes ses forces.
Logement Dans la même lignée que le programme fiscal du nouveau gouvernement, les mesures annoncées pour venir à bout de la crise persistante du logement se résume surtout à des cadeaux pour les promoteurs immobiliers et les investisseurs. Des instruments, qui ont pourtant clairement échoué par le passé pour améliorer l’accès au logement (comme l’amortissement accéléré) sont même renforcés. Des études scientifiques ont pourtant démontré que de telles mesures n’ont fait qu’accentuer les inégalités au niveau de l’accès au logement. Avec une politique qui mise uniquement sur l’offre, y compris en négligeant des considérations environnementales, le gouvernement affiche clairement que ce qui lui importe le plus, c’est l’augmentation des marges de profits des promoteurs immobiliers. L’OGBL s’engagera pour une autre politique – une politique qui met l’accès au logement au centre.
Santé et Sécurité sociale Au niveau de l’assurance maladie, le programme de gouvernement annonce d’ores et déjà vouloir «épurer… les missions de prise en charge de la CNS». Cependant, si un déséquilibre existait au niveau du budget de la CNS, l’OGBL n’accepterait aucune détérioration au niveau des prestations dans ce cadre. Ceci mettrait en péril notre système solidaire et mènerait à terme à un système de santé à deux vitesses où seuls les plus riches auraient les moyens de se faire soigner. L’OGBL s’oppose également à la révision annoncée de la loi sur le virage ambulatoire, avec comme but de privatiser l’utilisation d’appareils dit lourds, ce qui permettrait à des acteurs privés de venir s’enrichir sur le dos de notre système de santé. Enfin, l’OGBL souligne également que le principe du payeur-décideur doit impérativement être conservé au sein de la CNS.
Et demain l’austérité? Ce que le programme de gouvernement ne prévoit pas, c’est une politique d’austérité. Mais… il prévoit des baisses d’impôts, une pléthore de subventions et d’exemptions fiscales pour les entreprises, des investissements publics élevés, tout en excluant en même temps une augmentation de la dette publique. Le programme ne prévoit aucune nouvelle recette pour l’Etat et exclut d’avance toute mesure qui mettrait les très hauts revenus et les grandes fortunes davantage à contribution. Cette équation ne tient pas la route et fait écho aux politiques d’austérité menées après la crise financière de 2008. En excluant de nouvelles recettes ainsi qu’un endettement supplémentaire, le gouvernement n’aura d’autre choix que de s’attaquer aux dépenses de l’Etat. Le programme de coalition ne l’évoque pas, mais la suite logique du programme néolibéral présenté par la coalition CSV/DP consistera logiquement en la mise en œuvre d’une politique d’austérité.
Il n’est pas encore trop tard pour s’opposer à ces politiques annoncées. Pour l’instant, il ne s’agit que de déclarations d’intention, et non de projets de loi concrets.
Pour s’opposer aux attaques annoncées contre nos acquis, pour éviter une politique d’austérité, il faut une opposition forte. Il faut un syndicat fort. Et seul l’OGBL, le syndicat no 1 au Luxembourg, est en mesure de relever ce défi. Pour le faire, il a besoin du soutien de tous les salariés et pensionnés.
L’article a été publié dans l’édition de décembre de l’Aktuell
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