Comité exécutif de l’OGBL

L’OGBL peaufine sa position par rapport à la prochaine Tripartite

Lors de sa réunion du 1er mars 2010, le Comité exécutif de l’OGBL (ci-après «l’OGBL») a continué à peaufiner la position que l’OGBL défendra lors de la prochaine réunion du comité tripartite.

L’OGBL prend acte des positions exprimées par les diverses organisations patronales et qui visent en premier lieu une réduction des dépenses publiques en matière de sécurité sociale, réduction bien emballée sous la notion de «réformes structurelles».

L’OGBL prend par ailleurs acte du fait que le gouvernement compte proposer trois sujets pour l’ordre du jour, à savoir: (1) les finances publiques, (2) la compétitivité de l’économie et (3) la politique de l’emploi. Enfin, l’OGBL prend acte du «Programme de stabilité et de croissance du Grand-Duché de Luxembourg pour la période 2009-2014» que le gouvernement a envoyé à la Commission européenne fin janvier sans aucune consultation et analyse approfondie préalable ni avec les partenaires sociaux, ni avec le parlement.

Les salariés ont déjà payé pour la crise

L’OGBL est conscient du fait que la crise a frappé l’économie luxembourgeoise et que cette crise n’est toujours pas terminée. L’OGBL est conscient du fait qu’avec son accord plusieurs instituts bancaires luxembourgeois furent sauvés en début de crise par l’injection de milliards d’euros d’argent public. L’OGBL est conscient du fait que les salariés ont largement payé leur part des dégâts produits par cette crise par le biais (1) de l’augmentation dramatique du chômage, (2) par les pertes de revenu subies par des milliers de salariés dans le cadre du chômage partiel, (3) par le biais d’une extrême modération salariale (p.ex. reconduction de conventions collectives sans aucune forme d’amélioration), et (4) par un retardement de l’adaptation des salaires et retraites à l’inflation («l’index») pendant les années 2006 à 2009.

Ne pas se fier aux analyses des économistes orthodoxes

L’OGBL constate que le ministre du Budget Luc Frieden a fait calculer des trajectoires de sortie de crise, reflétées dans le programme de stabilité 2009-2014, qui visent un déficit public zéro d’ici 2014. En l’absence d’une analyse sérieuse sur le redémarrage de l’économie ainsi que sur le potentiel réel d’épargne publique sans que soit étouffé ce redémarrage éventuel p.ex. en réduisant de façon trop drastique les investissements publics, l’OGBL se demande s’il est prudent de s’exposer de cette façon vis-à-vis de l’exécutif bruxellois. Pourquoi ne pas viser un objectif plus modéré, comme par exemple un déficit de 0,8% du PIB en 2014 au lieu de zéro %, se demande le Comité exécutif de l’OGBL. Par ailleurs, l’OGBL constate qu’il y a divergences de vue sur la sortie de crise entre différents cercles d’économistes nationaux et internationaux. D’autres approches et trajectoires sont-elles envisageables? Pourquoi suivre l’avis des économistes orthodoxes, ceux qui par leurs recommandations «désintéressées» du passé ont contribué à la politique qui de manière fondamentale est responsable de cette crise, c’est à dire la politique de dérégulation, la politique de l’Etat aminci, la politique de l’ultime liberté de marché?
D’autres économistes plus indépendants, peut-être plus humains et sociaux, y compris des prix Nobel, préconisent d’autres pistes. Pourquoi ne pas prendre également en considération ces avis?

Lignes rouges

Compte tenu de cette situation déséquilibrée au niveau des points de vue, l’OGBL veut entrer dans les négociations tripartites tout en se fixant des lignes rouges à ne pas franchir:
(1) Sécurité sociale: pas de réduction des prestations dans aucun domaine, mais, le cas échéant augmentation des cotisations de façon paritaire (assurés, employeurs, Etat). Le cas échéant supprimer le plafond cotisable. Actuellement ce plafond est fixé à 5 fois le salaire social minimum. Cette mesure à elle toute seule rapporterait 160 millions de recettes supplémentaires à la Caisse nationale de santé. Ne pas lever ce plafond revient à continuer une pratique inégalitaire, un cadeau que l’Etat fait aux riches! Il s’agirait là d’une mesure de politique de sélectivité sociale juste.

En tout état de cause, l’OGBL n’entend pas débattre de l’avenir de l’assurance maladie et de la politique à mener en matière de santé au sein du comité de coordination tripartite. Il en va de même pour la question de la politique en matière des retraites. La sécurité sociale n’est pas à l’origine de l’augmentation de la dette publique luxembourgeoise, au contraire, la sécurité sociale est un atout social, économique et financier pour le Luxembourg.

Tant au niveau de l’assurance-maladie qu’au niveau de l’assurance-pension un processus de discussion et de négociation a été mis en place. Pour l’OGBL, il s’agit de continuer ce processus pour essayer de trouver le consensus le plus large possible sur des réformes permettant de garantir les prestations actuelles pour les assurés aussi dans le futur.

(2) L’OGBL s’oppose à toute velléité politique d’imposer une réduction des salaires et à toute ingérence politique dans la politique salariale et les négociations collectives. Ceci vaut tant pour le secteur marchand que pour le secteur non marchand, le secteur privé et le secteur public au sens large (les salariés du secteur hospitalier et du secteur social, les salariés des établissements et entreprises publics, les salariés et fonctionnaires de l’Etat et des Communes).

(3) L’indexation automatique des salaires et pensions n’est pas négociable!

Politique de l’emploi

En ce qui concerne la politique de l’emploi, pour l’OGBL des réformes s’imposent, à savoir :

  • renforcer la législation sur le maintien dans l’emploi;
  • renforcer la protection légale des salariés en cas de licenciement collectif par des entreprises qui font du profit;
  • renforcer la protection des salariés qui se retrouvent dans des emplois précaires, notamment les jeunes et les femmes;
  • élaborer et instaurer des modèles visant à réduire le temps de travail dans le but de maintenir et de créer des emplois;
  • renforcer la législation sur la cogestion des salariés au sein des entreprises pour garantir que la survie et le bon fonctionnement de l’entreprise dans la durée priment sur les intérêts à court terme des actionnaires et des cadres dirigeants;
  • maintenir, améliorer et étendre l’instrument du chômage partiel pendant la durée de la crise;
  • renforcer la protection des salariés âgés contre le chômage;
  • mettre en place une politique de protection efficace des salariés en cas de faillite d’une entreprise;
  • veiller à éviter toute discrimination entre salariés touchés par le chômage, notamment entre travailleurs résidents et non-résidents;
  • réviser certaines mesures prises en 2006 notamment en ce qui concerne les travailleurs avec un contrat à durée déterminée;
  • soutenir les initiatives pour l’emploi;
  • améliorer les dispositifs permettant tant l’accès individuel que l’accès collectif à la formation continue;
  • développer la formation professionnelle et son attractivité pour les jeunes par la création d’un fonds pour la formation professionnelle initiale et continue financé par une contribution de toutes les entreprises privées et publiques et par le soutien des entreprises qui forment et embauchent des jeunes;
  • réaliser une réforme en profondeur de l’ADEM afin de permettre à ce service public d’aider efficacement les demandeurs d’emploi;
  • assurer un financement adéquat du fonds pour l’emploi.

Finances publiques

L’OGBL met en garde contre une sortie trop rapide du plan conjoncturel anticrise décidé en 2009 et visant à soutenir l’économie, l’emploi et le pouvoir d’achat. Si l’investissement public doit être réduit dans les années à venir, il y a lieu de désigner clairement les domaines qui ne soient pas touchés par ces mesures éventuelles comme l’éducation nationale, la santé et le domaine social, les infrastructures nécessaires pour l’implantation de nouvelles activités économiques (ex. zones d’activités), le transport public, la politique de recherche et de développement, la mise en oeuvre des politiques nécessaires pour remplir les engagements du Luxembourg en matière de protection du climat et du développement durable ainsi que la coopération transfrontalière au niveau de la Grande Région. La politique d’investissement doit viser le nécessaire et pas le luxe, elle doit privilégier les investissements qui créent de l’emploi et profitent à l’économie locale.

L’OGBL est d’avis que des efforts supplémentaires sont nécessaires pour combattre plus efficacement la fraude fiscale.

Si des recettes fiscales supplémentaires étaient nécessaires, l’OGBL se prononce en faveur de mesures qui demandent un effort aux hauts revenus et aux grandes fortunes.

Pour un développement économique durable

En ce qui concerne la situation économique, l’OGBL rappelle que les fondamentaux de notre économie sont sains, que la profitabilité et la productivité de notre économie sont généralement bonnes. L’OGBL estime qu’une discussion axée sur le concept de compétitivité-coûts global ne peut que mener dans des impasses. Plutôt que de viser uniquement la compétitivité-coûts des entreprises, un débat soucieux de l’avenir du Grand-Duché de Luxembourg devrait viser en premier lieu le développement économique du pays, sa diversification économique, la politique industrielle à mener, les opportunités d’une politique de développement durable pour les PME/PMI ancrées dans le tissu économique et social local. Dans ce contexte, il y a lieu d’élaborer également des approches visant à faciliter la transition des salariés de secteurs en perte de vitesse vers les secteurs et activités d’avenir, notamment dans le contexte d’une politique offensive pour la protection de l’environnement et de développement durable.

Une approche sectorielle menée avec tous les acteurs concernés au sein de conseils sectoriels ‘compétences et emplois’ pourrait contribuer à renforcer l’attractivité du site économique Luxembourg.

Campagne de sensibilisation dans les entreprises

Le Comité exécutif a enfin donné son aval à une campagne de sensibilisation que l’OGBL conduira dans les entreprises sur base des revendications de la grande manifestation syndicale du 16 mai 2009. A titre de rappel, les mots d’ordre de cette manifestation étaient les suivants:

  • Pour nos emplois.
  • Pour notre pouvoir d’achat.
  • Pour notre sécurité sociale.
  • Ne touchez pas à l’index, à nos salaires et à nos pensions!
  • Ensemble contre tout démantèlement social!

Communiqué par l’OGBL
le 1er mars 2010