Le 20 juin, l’OGBL présentait ses revendications à l’adresse des partis politiques en vue des élections législatives d’octobre (voir l’édition de juillet de l’Aktuell). Dix jours plus tard, l’UEL faisait de même. Un cahier de revendications patronales que le Comité national de l’OGBL a analysé et commenté, le 4 juillet dernier, lors de sa dernière réunion avant la trêve estivale.
S’il y a bien un thème qui préoccupe actuellement aussi bien l’OGBL que le patronat, c’est bien celui de la pénurie de main-d’œuvre annoncée au Luxembourg et qui commence déjà à se faire ressentir. Selon le patronat, la prospérité du pays dépendrait «de la capacité du Luxembourg à attirer, former et mobiliser les talents de demain. Des talents durables…». Si le choix lexical est plus que discutable, l’OGBL partage toutefois l’analyse et l’objectif que se donne l’UEL.
Mais encore faut-il que les emplois proposés par les entreprises soient de nature à ce que ceux qui les occupent puissent les garder «durablement», en d’autres termes : que les salaires et les conditions de travail permettent aux entreprises de garder leurs salariés. Or, c’est précisément là que les solutions proposées par l’UEL risquent de ne pas d’atteindre leur objectif. L’UEL propose en effet de flexibiliser davantage le temps de travail, c’est-à-dire d’augmenter la disponibilité des salariés pour leurs entreprises. Les représentants des employeurs pensent-ils vraiment pouvoir accroître l’attractivité du marché du travail luxembourgeois en exigeant des salariés qu’ils soient plus flexibles, alors même que nombre d’entre eux ont aujourd’hui déjà des difficultés à concilier vie professionnelle et vie privée? Pour l’OGBL, cette proposition patronale est totalement lunaire.
L’UEL plaide ensuite également pour une flexibilisation des formes de contrats de travail. Une proposition qui exprime sans équivoque une volonté patronale de précariser les emplois et tout particulièrement de ceux qui entrent dans le monde du travail, les jeunes. L’OGBL, pour qui le contrat à durée indéterminé (CDI) constitue le seul véritable contrat de travail qui devrait valoir et qui doit donc être étendu, s’oppose fermement à cette orientation.
Autre désaccord majeur: la fiscalité. Que propose l’UEL? Sans surprise, d’augmenter l’attractivité fiscale pour les entreprises, alors même que celles-ci ont déjà profité de deux réductions d’impôts au cours des deux dernières législatures pendant que les ménages subissaient toute une série d’augmentations d’impôts. Pour l’OGBL, il est évident que c’est précisément le contraire qui doit avoir lieu: plus de justice fiscale entre l’imposition des ménages et celle des entreprises et plus de justice fiscale entre l’imposition des revenus du travail et l’imposition des revenus du capital.
Le système de pensions figure également en bonne place sur la feuille de route que l’UEL adresse au gouvernement. Cela fait des mois que les représentants des employeurs tentent d’imposer dans le débat public cette petite musique selon laquelle, à terme, le système de pensions ne serait pas viable et qu’il faut donc le réformer dès à présent pour le pérenniser. Or, la réalité est un peu différente. Certes, il existe des projections, réalisées notamment par l’IGSS, qui peuvent laisser penser que le système sera un jour en déséquilibre. Mais l’OGBL tient à souligner qu’il s’agit là uniquement de modèles mathématiques, basés sur un certain nombre d’indicateurs dont personne ne peut prédire l’évolution réelle (naissances, productivité, emploi, etc.) et qui pointe un éventuel déséquilibre dans un avenir lointain. Mais au plus tard, depuis ces trois dernières années (pandémie du Covid, guerre en Ukraine avec ses répercussions géopolitiques, crise de l’énergie, multiplication des conflits commerciaux), tout le monde devrait être conscient qu’il n’est pas possible de prévoir quoi que ce soit à aussi long terme. Autant se fier à une boule de cristal. Pour l’OGBL, ce type d’exercice relève en effet de la voyance.
Certes, il faut pouvoir prévoir l’avenir, mais un avenir tangible. Et pour l’instant, le système de pensions luxembourgeois se trouve dans une position confortable.
Certes, il faut pouvoir prévoir l’avenir, mais un avenir tangible. Et pour l’instant, le système de pensions luxembourgeois se trouve dans une position confortable. En effet, le fonds de compensation du régime de pensions affiche des réserves qui s’élèvent actuellement à 23,4 milliards d’euros (23 400 000 000 euros). Soit, 4,29 fois nos dépenses actuelles. Il n’y a donc vraiment pas d’urgence à agir.
Au contraire, l’OGBL estime qu’il est temps d’améliorer le système de pensions, de redresser certaines détériorations qu’a entrainées la réforme de 2012. Selon les calculs de la Chambre des salariés, les futurs pensionnés sur qui s’appliqueront tous les effets de cette réforme, auront un manque à gagner de l’ordre de 23 à 32 % par rapport à ceux qui auront été pensionnés avant que la réforme n’entre en vigueur. Par ailleurs, il faut aussi absolument revaloriser la pension minimale.
Et si jamais, un jour, le système de pensions rencontrait des difficultés, contrairement à l’UEL, l’OGBL plaide pour un relèvement des cotisations (il faut savoir que le Luxembourg affiche l’un des taux de cotisation les plus bas d’Europe) ainsi que du plafond cotisable pour mettre davantage à contribution les hauts revenus. Il ne plaide certainement pas pour un recul de l’âge de départ à la retraite.
Une chose est sûre, au regard du cahier de revendications présenté par le patronat, les discussions qui s’annoncent avec l’UEL dans les années qui viennent risquent d’être mouvementées. L’OGBL en est conscient et sera présent sur tous les fronts, dans l’intérêt des salariés, des pensionnés et de leurs familles.
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